Littérature

 Le faiseur de momies - 2e partie - chap. 10 (suite)

DEUXIÈME PARTIE

Sur la piste

X
Comment Frisquet retrouva la piste et ce qui s’en suivit
(suite)

Précédemment

Mais il réfléchit aussitôt qu'il ne pouvait pas rester là, car l'attente pouvait se prolonger fort longtemps, jusqu'à la nuit peut-être, et si la présence du chien risquait de passer inaperçue, la sienne serait remarquée immédiatement et compromettrait tout le reste.

Il chercha donc un poste d'observation d'où il pût tout voir sans être vu lui-même. Ce poste, il le trouva dans un autre débit de vins situé au commencement du passage, de la salle basse duquel il pouvait surveiller tout ce qui se déroulait dans un rayon de dix mètres devant lui.

Du reste, il n'eut pas besoin de faire provision de patience, car le hasard, ce dieu des policiers, se chargea bientôt de lui venir en aide.

Il venait à peine de se faire servir son amer citron qu'il vit ceci, à travers le rideau d'un blanc sale du misérable estaminet :

Sur le balcon de bois qui courait tout le long du premier étage du cabaret des « Aminches », un homme parut après avoir exploré d'un regard rapide le passage des deux côtés, et s'être ainsi assuré qu'il n'y découvrait rien de suspect, il se mit en devoir de descendre l'escalier extérieur menant à la rue.

C'était un individu de grande taille, dont la figure s'encadrait d'une longue et épaisse barbe rouge rejoignant des cheveux de la même couleur. Il était coiffé d'un melon défraichi et serré étroitement dans un pardessus gris-noir décoloré, dont le bord s'élimait.

En prenant contact avec le pavé, il jeta un dernier regard méfiant derrière lui, et voyant que le passage était désert, s'éloigna rapidement dans la direction opposée à celle par où était venu l'agent Bardet. Quant au chien, il ne le remarqua même pas. D'ailleurs l'eût-il vu, comment aurait-il pu se méfier de cet honnête barbet en train de dormir béatement du sommeil du juste aux rayons bienfaisants du chaud soleil printanier ?

En quoi il aurait eu tort, et ceci prouve la vérité de cet adage qu'il ne faut jamais se fier aux apparences. En effet, à peine eut-il le dos tourné que l'honnête barbet, qui ne dormait que d'un œil, se réveilla subitement, s’étira et se mit à trotter à distance sur ses traces, suivi de près par le compagnon maçon en qui s'était incarné l'agent Bardet.

Le malheureux n'avait eu que le temps d'avaler d'un seul trait son apéritif, au risque de s'étrangler et au grand ébahissement de la tenancière du débit.

Celle-ci, en effet, ne put jamais arriver à comprendre pourquoi son client était soudain si pressé et se sauvait toutes jambes, comme s'il avait eu le feu au derrière, sauf révérence parler…

Mais le brave agent ne songeait guère à donner des explications à la bonne femme. Ce qui le préoccupait pour le moment, c'était de s'expliquer à lui-même par quelle fantaisie imprévue Frisquet le lançait aux trousses de ce grand diable roux…

Cet homme ne paraissait, au premier abord, avoir aucun rapport avec la piste qu'il était en train de suivre.

Il ne devait pas tarder à apprendre au contraire qu'un étroit rapport unissait les deux personnages.

La sortie du passage Moret sur la rue des Cordelières

Au sortir du passage, l'homme avait tourné à droite, pour rencontrer la rue des Cordelières, dans la direction du boulevard Arago. Vers le milieu de la rue, il s'arrêta, comme pour lire une affiche, mais en réalité pour regarder furtivement derrière lui s'il n'était pas suivi. Il eut beau embrasser la rue d'un bout à l'autre, d'un seul coup d'œil, il n'y vit rien qui pût lui causer le moindre soupçon. Il ne distingua même pas ce compagnon maçon qui, sans qu'il s'en doutât, s'attachait si obstinément à ses trousses.

En effet, le précautionneux Bardet, avant de tourner, lui aussi, le coin du passage, s'était dissimulé derrière l'angle de la dernière maison, d'où l'œil le plus perçant eût eu de la peine à voir dépasser le bout de son nez. Seul, le bon Frisquet flânait au milieu de la chaussée de son air le plus inoffensif.

Complètement rassuré et certain à présent de ne pas être suivi, l'homme rouge s'engagea sur le boulevard Arago, et s'arrêta bientôt devant un débit de tabac, où l'agent Bardet, qui avait remonté la rue au pas de course le vit pénétrer.

À travers la vitre, il put apercevoir sa figure tandis qu'il se faisait débiter quatre sous de tabac et un cahier de papier à cigarettes. Alors, ce fut dans son esprit un trait de lumière. Il passa vivement sur le trottoir opposé du boulevard, après avoir lancé un regard d'admiration au bon Frisquet, qui attendait à la porte du bureau de tabac, gravement assis sur son train de derrière.

L’homme rouge n'était autre que le garçon de salle de l'Académie.

Boulevard Arago à la hauteur du débouché de la rue des Cordelières

Après avoir roulé sa cigarette qu'il allumait au gaz de l'appareil automatique du bureau de tabac, il sortit et remonta tranquillement le boulevard Arago jusqu'à l'avenue des Gobelins qu'il traversa pour continuer sa route sur le boulevard Saint-Marcel.

Il parcourut encore à peu près deux cents mètres en plongeant à l’intérieur des petits restaurants, fort nombreux dans ces parages populeux, un regard d'amateur.

D'un groupe à l'autre, des blagues s’échangeaient, auxquelles répondaient les éclats de rire des midinettes.

Sur le comptoir d'un bar, la file interminable des tasses de café économique s'alignait ; les tournées succédaient aux tournées avec une rapidité qui tenait du prodige.

Enfin l'homme parut avoir trouvé ce qu'il cherchait.

C'était un débit de marchand de vin, presque vide, où de nombreuses serviettes, roulées dans leurs ronds et entassées dans un casier, témoignaient éloquemment d'un commerce bien achalandé.

Un moment, l'homme, tenté par ce beau soleil, hésita s'il resterait à la terrasse mais il y vit sans doute un inconvénient, car il entra et alla s'asseoir à une petite table de marbre blanc, au fond de la salle, où flottait encore dans l'air la fumée grise des pipes et des cigarettes.

L'agent Bardet, qui le suivait de près sous sa détroque de compagnon maçon, et dont l'estomac aussi criait famine, se demanda s'il n'allait pas en faire autant et entrer à son tour. La tentation était vraiment forte, mais il réfléchit qu'il y aurait là de sa part une imprudence capable de tout perdre. Laissant donc celui qu’il avait filé jusqu'à présent avec tant de succès à la garde de Frisquet, roulé en boule sur le trottoir, il avisa à quelques mètres de là un autre restaurant, sur la devanture duquel se lisait, en lettres jaunes, cette inscription :

À la réunion des cochers.

L'enseigne n'était pas menteuse, car devant le trottoir se rangeaient à la file cinq ou six fiacres dont les automédons étaient en train de prendre à l'intérieur de l'estaminet leur café arrosé de nombreux pousse-café, tout en faisant des parties de manille.

Ce spectacle fit germer dans l'esprit inventif de l'agent Bardet une idée de génie. Il s'agissait bien de manger à présent Il songerait à cela tout à l'heure s'il en avait le temps. Pour le moment, il fallait agir.

Ce ne fut pas long.

Il alla droit à l'un des cochers qui ne jouait pas, mais suivait la partie avec un intérêt passionné en fumant sa pipe.

Et lui frappant sur l'épaule :

— Pardon, mon brave, j'aurais deux mots à vous dire.

L'autre regarda, interloqué, ce compagnon maçon qui ne se présentait guère sous les apparences d'un client, et-lui demanda d'un ton soupçonneux :

— Qu'est-ce que vous me voulez ?... Je ne vous connais pas, moi.

— Prenons toujours une tournée... Ça n'engage à rien, et je vais vous dire ce que j'attends de vous… C'est moi qui régale.

L'argument était sans doute irrésistible, car le cocher s'y rendit et les deux hommes allèrent s'asseoir, dans un autre coin de la salle

Suite



Le 13e en littérature

La cité Doré

Coeur d'enfant

par
Charles de Vitis

À la hauteur de la place Pinel et de l’abattoir, entre le boulevard de la Gare et le boulevard de l’Hôpital, s'étend un vaste terrain qui est loué par bail à divers locataires. Le type même de la saleté et de la misère imprévoyante se trouve dans le rassemblement de masures, coupé de ruelles en zigzag et qu’un hasard ironique fait appeler cité Doré. Les cours des miracles devaient être ainsi.

(1899)

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Rue du Banquier

Madame Gil-Blas

par
Paul Féval

Le fiacre tournait court l'angle de la rue du Banquier.
Cela s'appelle une rue, mais c'est en réalité une manière de chemin pratiqué entre des murs de jardins. Il n'y a pas une âme en plein jour.

(1856)

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Barrière des Deux-Moulins

Les Chifffonniers de Paris

par
Turpin de Sansay

En suivant les rues Saint-Victor, du Marché-aux-Chevaux et de Campo-Formio, on arrivait à la barrière des Deux-Moulins, située de l'autre côté du boulevard extérieur.

(1861)

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Barrière des Deux-Moulins

Causerie d'un camarade

par
Jean Loyseau

Allez un dimanche, ou , même , un lundi soir , du côté de l'ancienne barrière des Deux-Moulins : regardez, respirez et écoutez, si vous en êtes capables , tout ce qui frappe à la porte de vos cinq sens : votre odorat percevra je ne sais quelle odeur nauséabonde et méphitique, dans laquelle se mêlent indistinctement la fumée de tabac ; les exhalaisons du cabaret, qui forment , à elles seules, tout un arsenal d'infection...

(1862)

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La Butte aux-Cailles

Les Loups de Paris

par
Jules Lermina

Il est sur la rive gauche de la Seine, au-delà de la rue Mouffetard et de la Montagne-Sainte-Geneviève, un lieu étrange, sauvage...

(1877)

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En remontant le boulevard de l'Hôpital

La petite Miette

par
Eugène Bonhoure

Ce jour-là, 3 octobre 1886, le train express de Bordeaux — deuxièmes et troisièmes classes — avait eu plus d'une heure de retard et le service de l'arrivée s'en ressentait...

(1889)

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Rue des Cinq-diamants

La criminelle

par
Jules Lermina

Un plus érudit découvrira l'origine de ce nom singulier, la rue des Cinq-Diamants.
L'étude consciencieuse qui a été faite pour le vieux Paris tentera quelque explorateur des anciennes banlieues annexées : et quel champ plus vaste sera offert à sa curiosité que l'étrange et hideux quartier de la Butte-aux-Cailles ?

(1881)

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Saviez-vous que... ?

En 1887, Camille Claudel vivait dans un atelier loué pour elle par Auguste Rodin, la Folie Neubourg ou Clos Payen, 68 boulevard d’Italie, actuel boulebard Blanqui

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Le 7 décembre 1930, un beau dimanche, à l'angle de l'avenue des Gobelins et de la rue Philippe- de-Champaigne, le manœuvre géorgien Parmény Tchanoukvadzé, trente-six ans, abattait à coups de pistolet automatique M. Noé Ramichvili, quarante-neuf ans, ancien ministre de l'Intérieur du gouvernement menchevik de Géorgie, président à Paris du parti Tebanoukvadze social démocrate géorgien, blessant M. Menagarichvili, secrétaire du précédent, qui se portait au secours de son chef.

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C'est le dimanche 30 septembre 1934 que fut inauguré le groupe scolaire construit rue Küss en présence de M. Villey, préfet de la Seine et des élus et notabilités de l'arrondissement.
Des discours furent été prononcés par MM. Villey, Gelis et Deslandres.

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En juillet 1895, la petite Jeanne Monseux, âgée de 7 ans, se rendait comme chaque jour chez les époux Lorphelin demeurant boulevard Kellermann afin d’y nourrir leur chèvre qui, depuis quelques jours, affectait un comportement bizarre. Soudain, l’enfant se mit à crier. Les époux Lorphelin se précipitèrent dans la cabane et aperçurent la pauvre petite luttant désespérément contre la chèvre qui lui avait fait au visage et aux bras de profondes morsures, d'où le sang s'échappait.
Il s’avéra que la chèvre était enragée. Elle fut abattue.
Quant à la petite Jeanne, elle fut sans retard transportée à l'institut Pasteur.

L'image du jour

La folie Neubourg sur le boulevard Auguste Blanqui, déjà en partie démolie.