Les chauffoirs publics
Journal des débats politiques et littéraires — 18 février 1896
Les chauffoirs publics installés sur différents points de Paris pour les malheureux et ouvriers sans travail ne servent, en réalité, qu'aux malfaiteurs et rôdeurs des boulevards extérieurs. Ils sont ainsi devenus l'asile de tous les gens sans aveu qui en expulsent les vrais pauvres ou parfois leur font subir des traitements ignobles.
Un malheureux colporteur, Eugène Monition, a été hier la victime de ces dangereux individus. Il était entré dans le chauffoir installé sur le boulevard de la Chapelle, près du square. Tout à coup une vingtaine de souteneurs qui se trouvaient là l'entourèrent, et, après l'avoir roué de coups, le déshabillèrent. Puis ils se mirent en devoir de lui couper les cheveux, mais avec une telle brutalité que le malheureux eut en peu de temps la tête ensanglantée.
Aux cris qu'il poussait, des agents accoururent. Les misérables qui l'avaient ainsi traité prirent alors la fuite et il fut impossible de les rejoindre. Monition a été conduit chez M. Mauroy, commissaire de police, qui a adressé un rapport à la préfecture de police.
Peut-être des faits aussi scandaleux détermineront-ils l'administration à supprimer les chauffoirs publics qui ne remplissent aucunement le but que l'on s'était proposé et qui constituent un danger permanent au triple point de vue de la moralité, de la sécurité et de la salubrité publique.
A lire également