Le marché des Gobelins
Le Figaro — 6 aout 1867
Nous avons fait hier un voyage d'exploration dans les régions lointaines et inhospitalières du 13e arrondissement. Nous y avons découvert un nouveau marché, construit en briques et sur caves, d'après le système si heureusement adopté aujourd'hui.

Ce marché est assurément, après les halles centrales, le mieux réussi. Son appropriation utile n'exclut pas une certaine élégance. Il est vaste, aéré, léger de construction, affectant la forme d'un long rectangle terminé en pentagone à ses deux extrémités.
Il est situé entre la manufacture des Gobelins et l'ancienne barrière d'Italie ou de Fontainebleau, sur le côté gauche en sortant de Paris. Ce spécimen du Paris nouveau semble étonné de se trouver là en avant-garde c'est comme une carte de visite déposée par M. Haussmann dans les quartiers éloignés ou primitifs où rôtit le filet de cheval.

De grands mouvements de terrain devant avoir lieu l'année prochaine pour adoucir les pentes de la rue Mouffetard et du boulevard de l'Hôpital, le marché, dont les deux entrées principales font face à ces deux voies, se trouve actuellement en. contre-bas de trois mètres au moins, mais des travaux partiels et provisoires sont entrepris pour le rendre abordable.
Il n'est pas encore baptisé ni livré à la consommation publique : On met la dernière main aux aménagements intérieurs qui se composent d'un rang simple sur chaque côté, adossé aux murs et d'un rang double dans le milieu.
Il sera inauguré le 15 août prochain et s'appellera, sans doute, marché des Gobelins.

Quelques années plus tard ...
Le marché des Gobelins.
Le Journal ― 30 juin 1901
Le marché des Gobelins, désaffecté et en partie inoccupé depuis nombre d'années, doit être démoli.
Le terrain de ce marché doit être morcelé et mis en vente, déduction faite de l'emprise nécessaire au prolongement de la rue Primatice jusqu'à la rue Philippe-de-Champagne.
Les habitants du quartier se demandent pourquoi le marché, qui n'offre aucun intérêt historique, n'a pas encore disparu.
Et en novembre 1901...
Le Petit journal ― 1er novembre 1901
Le long et étroit marché de la place d'Italie, installé derrière la mairie du treizième arrondissement, entre la rue Philippe-de-Champagne et la rue Coypel, n'existera bientôt plus.
La moitié de cette construction en fer et en briques sera conservée pour détenir, dit-on; le magasin de décors d'un théâtre de drame; l'autre moitié, en bordure de l'avenue des Gobelins, est presque entièrement démolie. Sa toiture a été enlevée ; de nombreuses fermes métalliques ont-été démontées il ne reste plus guère que les soubassements en briques.
Ce marché n'avait pas beaucoup de chalands; il a été remplacé par un marché volant sur le boulevard d'Italie.
Beaucoup de marchés locaux de Paris meurent ainsi de consomption ; ils sont détruits, remplacés par des maisons, par des squares ou bien ils sont ravalés au rôle de magasin, de grange ouverte à tous les vents. Ils abritent tristement des décors, images fardées et peu réelles de la nature, après avoir renfermé les produits naturels qui conservent la vie.

La partie du marché comprise entre la rue Primatice et le boulevard de l'Hôpital
subsista jusqu'aux années 1960 et disparut avec la construction du centre de police du XIIIe dont
l'ouverture était prévue pour la fin de l'année 1967.
En 1914, dans cette partie conservée, la
jeunesse des Beaux-Arts y organisa, le 22 juin, le bal annuel des QUAT'Z'ARTS sur le thème de la
guerre de Troie et de l'Illiade. Comme à l'habitude, les costumes étaient sommaires. (NdE)
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