L'exécution d'Ulbach
La Quotidienne — 12 septembre 1827
Nous empruntons à la Gazette des Tribunaux quelques détails sur les derniers moments d’Ulbach.
« Depuis environ trois semaines, Ulbach s’était livré tout entier aux consolations de la religion. Il se disposait avec ferveur à l’un de ces actes touchants et solennels, auxquels se rattachent ordinairement les plus doux souvenirs de l’enfance. C’est à Bicêtre et quelques jours avant de monter à l’échafaud, qu’Ulbach a fait sa première communion !
Ramené dès-lors à des idées plus saines, à de plus louables sentiments, il a écrit deux lettres touchantes à son ancien maître et à la maîtresse de sa victime, à celle-là même contre laquelle, pendant les débats, il lançait des regards pleins de haine et de vengeance. Il les supplie de lui pardonner son crime et tout le chagrin qu’il leur a causé, leur demande leur bénédiction, et déclare, en terminant, qu’il est résigné à son sort, qu’il attend sans crainte le supplice qui doit terminer ses tourments. Un jour, il entreprit d’écrire l’histoire de sa vie ; mais après avoir tracé la première page, il la déchira et abandonna son projet.
Hier matin, dès cinq heures, Ulbach a été visité dans son cachot par un jeune homme de 19 à 20 ans, qui appartient à la Société des bonnes œuvres et qui a récité avec lui les prières des agonisants. À sept heures et demie, Ulbach a reçu l’ordre fatal du départ. Il s'est mis à genoux, a fait sa prière, a laissé échapper quelques larmes, et après avoir adressé des remerciements à son gardien, il est monté dans la voiture avec le jeune homme, qui depuis le matin ne l'avait pas quitté un seul instant. Il est arrivé à huit heures et demie à la Conciergerie.
Quelques minutes avant quatre heures, au moment si redoutable des derniers apprêts du supplice, Ulbach paraissait avoir recueilli toutes les forces de son âme. Il s’avance d’un pas ferme, et reste debout devant la sellette de bois. On se dispose à le dépouiller de sa veste. Il l’ôte lui-même rapidement ainsi que sa cravate. Et cependant la nature reprend un instant son empire… Il pâlit, ses genoux fléchissent, et aussitôt il s’empresse de flairer un mouchoir humecté de vinaigre, qu’il tenait à la main. Mais déjà l’usage même de cette main ne lui est plus permis. On s’en empare pour la lier derrière le dos, et alors l’exécuteur prenant lui-même le mouchoir, le présente devant la figure d'Ulbach. « Non, non, lui dit celui-ci, c’est passé, je n’en ai plus besoin. » Toutefois, l’exécuteur place le mouchoir sous la chemise d'Ulbach qui ne cesse de s’y opposer en lui disant : « Je vous remercie, je me sens fort, je n’ai besoin de rien. » Et en effet, pendant tout le reste de ces lugubres préparatifs, son courage n’a pas failli un seul instant. Il a fait entendre seulement un douloureux soupir, et des larmes roulaient dans ses yeux, qu’il élevait quelquefois vers le ciel.
Une foule immense l’attendait à sa sortie. Une multitude de femmes, au moment où le condamné a paru sur la fatale charrette, se sont levées tout-à-coup avec un long frémissement, et l’ont suivi de leurs regards jusqu’à la grille de la-cour du Palais. On en a vu quelques-unes verser des larmes avec abondance.
Ulbach, pendant toute la route, écoutait son confesseur et baisait le crucifix, que le vénérable ecclésiastique approchait de ses lèvres. Arrivé au pied de l’échafaud, il s’est mis à genoux, a récité une prière, et a franchi l'escalier d’un pas assuré. On a entendu alors un chut universel s’élever autour de l'échafaud, et le peuple, qui s'attendait, à ce qu’il paraît, à entendre un discours, a fait tout-à-coup un profond silence. Mais Ulbach, sans dire un seul mot, s’est livré à l’exécuteur, et quelques secondes après, il était dans l’éternité ! »
La Bergère d'Ivry
Les faits rapportés par la presse
Le procès d'Honoré Ulbach - 27 juillet 1827
- Accusation d'assassinat contre le sieur Ulbach. - Le Constitutionnel du 11 juillet 1827 reproduisant la Gazette des Tribunaux
- L'acte d'accusation- Journal des débats politiques et littéraires - 27 juillet 1827
- Le procès d'Honoré Ulbach - Journal des débats politiques et littéraires - 28 juillet 1827
- Le procès d'Honoré Ulbach - Le Constitutionnel - 28 juillet 1827
- Ulbach se pourvoit finalement en cassation - Le Constitutionnel - 30 juillet 1827
L'exécution d'Honoré Ulbach
- Exécution d'Ulbach - Journal des débats politiques et littéraires - 11 septembre 1827
- Les derniers moments d’Ulbach - La Quotidienne du 12 septembre 1827 reproduisant La Gazette des Tribunaux
Récits d'historiens et autres auteurs
- Alfred Delvau : Barrière Croulebarbe (1865)
- Revue des Théâtres : "La Bergère d'Ivry" - Le Siècle du 9 juillet 1866
- Les exécutions en place de Grève : Ulbach (La Lanterne - 1890)
- Le Rappel : La bergère d'Ivry (A propos de la cavalcade du Petit-Ivry - 1891)
- Georges Cain : Le long de la Bièvre (1905)
- Martial de Pradel de Lamase : Un rendez-vous de chasse du Vieux Paris (1906)
- Martial de Pradel de Lamase : Le champ de l'Alouette (1933)