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 Pierre Bénite : 2 - A la Poterne des Peupliers

Voyage au pays des zoniers

II — A la Poterne des Peupliers

L’Ami du peuple — 20 juillet 1930

Quand la Bièvre arrive à Bicêtre, à la Poterne des Peupliers, pour se jeter sous les murs de Paris, elle donne au paysage qu’elle traverse avant de disparaître une dernière illusion. L’herbe, les arbres ont envahi ses rives. Son lit s’est creusé une petite vallée et, de chaque côté de son cours, des jardinets de zoniers, des orties, des ronces et des moustiques persuadent le promeneur qu’il a gagné la campagne. Paris est là, pourtant, à cent pas derrière lui, avec ses voitures, ses tramways et ses sonneurs de trompe.

Illustration originale de l'article

 

On arrive au cours de la Bièvre, près de la porte de Bicêtre, en franchissant un terrain vague. Ah ! certes, la Bièvre ne reflète pas là la douceur du ciel d’Ile-de-France. La Bièvre est lumineuse et lourde. Elle a traîné, à un mille en amont, dans les détritus des usines.

C’est une Bièvre pour zoniers, où rien n’est à pêcher, sinon des cadavres de chats, des poteries cassées et autres ustensiles. La Bièvre pousse son eau comme un flot d’idées noires, dégoûtée qu’elle est par avance de pénétrer dans la Ville-Lumière par le trou des égouts.

C’est sur la pente, cependant, d’une de ses berges étranges que nous nous engageons. Des herbes nous fouettent les genoux et des chiens nous eng... Ils sont derrière les barrières hétéroclites de jardinets feuillus, où poussent des soleils, des roses et des salades. Des bicoques faites de planches, de toiles goudronnées et de tôle bouchent sans ordre, par-çi, par-là, entre les arbres quelques horizons. C’est la zone bourgeoise, la zone à pavillons au bord de la rivière, la zone horticole et sylvestre.

Nous allons par un sentier inégal semé d’embûches. On glisse, on s’agrippe, on repart. Sur la nature vouée aux mouches, tout ce qu’on évite en marchant est de matière inavouable ; des oiseaux chantent cependant, et de gros papillons, les mêmes qu’on voit à Bagatelle, folâtrent de rose en pissenlit.

C’est pourtant un vallon charmant que celui de Bicêtre. Croquis de peintre, photo ou film de caméra, quoi donc pourrait laisser soupçonner que l’atmosphère qui flotte sur cette pauvre rivière, dans ce décor herbu et vert comme un poireau est d’ordre aussi douteux ?

Pas un bruit autre que le chant des oiseaux, l’aboiement des chiens, le bourdonnement des mouches. Pour l’instant, la zone matinale en cet endroit est vide. Ses occupants sont en quelque lointain Paris en train de traiter sans doute un marché de vieux fers.

Sur la rive opposée à celle où nous marchons, d’autres baraques, à travers des trouées de verdure, nous montrent, on dirait, leurs communs. C’est, entre des murs sans toit, des dépôts de ferrailles, des cabanes à lapins sans lapins, des cheminées parties du sol, des mats penchés vers la rivière.

Sur cette vie d’apparence désolée que caressent des branches, des antennes de T.S.F. surmontent encore le paysage. C’est que, le soir, à l’heure où la journée finie, la mouche cesse de bourdonner et les oiseaux de sa gaver d’insectes, Radio-Paris ou Daventry, Berlin, Londres ou Toulouse donnent leur part d’opéras surannés, de tangos et de blues aux zoniers riverains de la Bièvre à Bicêtre.

Pierre Bénite.

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Aperçu de la zone entre la poterne des Peupliers (entrée de la Bièvre dans Paris à gauche dans le mur des fortifications) et la porte de Bicêtre
Photographie (détail) de Charles Lansiaux
Crédits : © Charles Lansiaux / DHAAP


Sur la Zone...

Le commencement de la fin de la Zone

Les articles d'Émile Condroyer

La capitale démantelée (1930)

Autres textes d'Émile Condroyer

Voyage au pays des zoniers (Série d'articles de Pierre Bénite - 1930)

Dans l’étau des grands buildings (Série d'articles de Pierre Humbourg - 1931)

Divers aspects de la zone dans les années 30

Les Zoniers

Faits divers

Dans la presse...


L’état de santé de Blanqui

À l'issue de la réunion, le brusque passage d'un milieu chauffé dans l’atmosphère humide de la rue lui causa un frisson : Blanqui eut une défaillance dont il se releva aussitôt. Il voulait marcher, mais les personnes qui l'accompagnaient l'obligèrent à monter dans un fiacre où, malgré sa résistance, on le recouvrit d'un gros pardessus.
On le conduisit chez un de ses amis, 25, boulevard d'Italie. (1880)

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Le point sur les travaux dans le 13e arrondissement

La transformation des anciens boulevards extérieurs, commencée l'année dernière sur la rive gauche, entre le quai de la gare et la place de l'ex-barrière d'Enfer, a été entreprise par les deux extrémités en même temps ; ces travaux sont terminés d'un côté jusqu'à proximité de la place d'Italie, et de l’autre jusqu'au boulevard d'Ivry, qu'on va transformer à son tour. (1864)

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Les anciens abattoirs de Villejuif

Séparé seulement par la largeur du boulevard de l’Hôpital de ce vieux quartier des Gobelins où l'on a fait de toutes parts de larges trouées d'air et de lumière, un mur nu, hideux, noirâtre, immense dans toutes ses proportions, se dresse, entourant un espace de vingt-huit mille mètres carrés. (1903)

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L'anniversaire de la mort de Blanqui

Malgré les récentes instructions du préfet de police défendant la formation des cortèges sur la voie publique, les journaux révolutionnaires avaient convoqué leurs amis à plusieurs reprises, pour une heure de l'après-midi, devant la maison où est mort Blanqui l'an dernier, au n° 25 du boulevard d'Italie, au coin de la rue du Moulin-des-Prés. Un temps superbe : pas un nuage au ciel, un chaud soleil et un air vif. (1882)

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Les murs de la Salpêtrière

Le conseiller municipal Paul Bernard, au cours de la dernière session, a réclamé la suppression des murs de la Salpêtrière.
Toute la gauche du boulevard de l'Hôpital est occupée, comme on sait, par des établissements municipaux ou privés qui couvrent une surface très étendue. Il y a l'hospice de la Salpêtrière, le magasin central de l'Assistance publique, deux ou trois maisons, puis les chantiers du charbon de Paris et les abattoirs de Villejuif. (1896)

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Saviez-vous que... ?

En 1887, Camille Claudel vivait dans un atelier loué pour elle par Auguste Rodin, la Folie Neubourg ou Clos Payen, 68 boulevard d’Italie, actuel boulebard Blanqui

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La rue Berbier du Mets tient son nom de Gédéon Berbier du Mets (1626-1709), qui fut le premier Intendant général du Garde-Meuble de la Couronne, ancêtre du Mobilier national.

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L'orage remarquable par sa longue durée plus encore que par sa violence, qui éclata le lundi 23 juillet 1906 au soir sur Paris, causa beaucoup de dégâts. Dans le treizième arrondissement, la Bièvre, très grossie, sortit de son lit et inonda le passage Moret, dont les maisons ont dû durent être évacuées. Rue de la Glacière, 25, les ateliers de MM. Dufresne et Rommutel furent envahis par les eaux.

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La première boucherie de viande de cheval a été ouverte le lundi 9 juillet 1866, boulevard d'ltalie, 3, ancienne barrière de Fontainebleau. Le prix de cette viande, qui était vendue sans os non adhérents aux morceaux (sans réjouissance), était d'environ deux tiers moins élevé que celui du bœuf.

L'image du jour

La folie Neubourg sur le boulevard Auguste Blanqui, déjà en partie démolie.