Un jour dans le 13e

 paris-treizieme.fr — La première boucherie de cheval de Paris (1866)

Boucherie de cheval.

Le Monde illustré — 22 septembre 1866

On sait avec quel sourire d'incrédulité le public parisien accueillit, il y a quelques mois, la nouvelle de l'ouverture d'une boucherie de cheval ; on se rappelle toutes les plaisanteries qui précédèrent et suivirent les banquets hippophagiques, et quel dégoût inspirèrent les menus publiés alors.

Eh bien ! malgré l'incrédulité, les plaisanteries et le dégoût, le fait est acquis : une boucherie de cheval vient d'être ouverte à Paris.

On vend du cheval. On en mange.

Tous ceux qui, méprisant les préjugés et les traditions, ont mangé de cette viande soit à la mode, en filet piqué, en bouilli, en saucisson, l'ont trouvée excellente.

Le doute n'est plus permis. Les hippophages avaient raison !

Notre gravure représente la devanture de la boutique qu'un boucher, — pourquoi pas un chevalier ? — vient d'ouvrir près du boulevard d'Italie. La viande de cheval qui figure à l'étal est vérifiée et estampillée par le vétérinaire de l'administration.

Un restaurant est contigu à cette boucherie. Les consommateurs ont à choisir entre l'ordinaire à 20 c., le bifteck à 20 c., le cheval à la mode à 20 c., et la salade à 10 c.

Ce restaurant, dont les prix sont à la portée des bourses les plus modestes, fait un grand débit de cette nourriture aussi saine qu'abondante.

Plus loin, on a installé une charcuterie où pendent de superbes saucissons dont la chair rosée plaît à l'œil.

L'ouverture de ces établissements rend de grands services à la classe ouvrière. Le problème de la vie à bon marché est réalisé !

Pourquoi, du reste, la viande de cheval qui fournit un bouillon exquis inspirerait- elle du dégoût ?

Le noble animal ne se nourrit-il pas d'avoine, de foin, de paille et de son ?

Que ceux qui critiquent la vente de cette viande réfléchissent un peu, et après avoir mangé du porc sans dégoût, ils deviendront bientôt de fervents disciples de l'hippophagie.

Il faut noter que les ouvriers ne sont pas les seuls acheteurs de la viande de cheval ; les bourgeois et les riches y prennent goût aussi.

La nouvelle boucherie du boulevard d'Italie est le rendez-vous des chefs de cuisine et des cordons bleus, en un mot de tous les amateurs de l'art culinaire.

Les chevaux de l'avenir sont destinés à être mangés par l'homme et non par de vils animaux.

Leur chair figurera sur nos tables, et les différentes façons de l'accommoder seront mises au concours.

Les noms nouveaux exciteront la gaité des convives.

Un farceur dira : C'est trop salé, je préfère le cheval sans sel.

Ou bien la maîtresse de la maison qui vous dira : Avez-vous assez de cheval ? Vous répondrez : Oh ! trop ! etc., etc., etc.

Je vois déjà tous les Vatels de Paris interroger leurs fourneaux et se creuser la tête pour trouver une sauce nouvelle.

Nous pouvons affirmer qu'au point de vue de la gastronomie, le cheval n'a pas dit son dernier mot.

Allons, baron Brisse, faites-en manger aux lecteurs de la Liberté.

Vite un joli menu.

E. H.

Un siècle plus tard, cette boucherie existait encore. Le centre commercial Italie 2 l'a, depuis, remplacée.
Image source (détail) : Edith Gérin (1950)


Saviez-vous que... ?

À la séance du 30 octobre 1879 du Conseil Général de la Seine présidée par M. Réty, M. Georges Martin déposait une pétition d'industriels du 13e arrondissement demandant la création d'une gare de marchandises à la jonction de la rue Baudricourt et de la rue Nationale prolongée. Cette pétition, reprise par M. Georges Martin sous forme de projet de vœu fut renvoyée à la commission desdits vœux.
Ce sera la « gare des Gobelins », finalement issue d’autres projets, qui sera ouverte le 15 mai 1903 seulement et restera en fonctionnement jusqu’en 1991.

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L'église Notre-Dame de la Gare a été construite en 1855 aux frais de la commune d'Ivry

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La gare de Paris-Gobelins a été mise en service le 15 mai 1903. Elle le demeura jusqu'en 1991. Son ouverture eut pour effet de doter Paris d'une nouvelle porte car il y avait encore un octroi à Paris et la gare des Gobelins était un point d'entrée et de sortie.

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Ce fut en 1818 que l’espace compris entre l’hôpital de la Salpêtrière, l’ancien mur d’octroi et le boulevard de l’hôpital et qu’on appelait alors le village d’Austerlitz, fut enfermé dans Paris dont le mur d’enceinte fut reporté plus loin ; ce village ne comptait que trois rues : la grande rue d’Austerlitz, le chemin des Étroites-Ruelles et la rue des Deux-Moulins ; deux autres chemins furent alors convertis en rues sous les noms de rues Bellièvre et Bruant. Sur l’emplacement du village d'Austerlitz, on forma les chemins de ronde des barrières de la Gare et d’Ivry, la place de la barrière d’Ivry, les rues de la barrière des Gobelins, de l’Hôpital général et de Villejuif ; enfin on construisit la barrière d’Ivry et l’abattoir de Villejuif. C’est, nous dit H. Gourdon de Genouillac dans son « Histoire nationale de Paris et des Parisiens, depuis la fondation de Lutèce jusqu’à nos jours », depuis la suppression des barrières, le quartier de la Salpêtrière.

L'image du jour

La place Pinel vue de la rue Esquirol avec un aperçu de la rue Nationale de l'autre côté du métro.

L'entrée de la cité Doré sur la place Pinel était situé à gauche.