Un jardin unique en son genre, celui des Gobelins, va être inauguré la semaine prochaine
L’Intransigeant — 11 mai 1938
Paris aura la semaine prochaine un nouveau jardin public, un très beau jardin. Il n’en possédera jamais trop !

Le fait est d’autant plus intéressant que ce nouveau jardin se trouve dans un arrondissement, au reste fort peuplé, le 13e, qui, il y a encore un an, ne possédait pas le moindre square.
Ainsi, il va en avoir deux. L’été dernier, un premier jardin y fut ouvert ; un très grand jardin de 40.000 mètres, avenue de Choisy, sur l’ancien emplacement d’une usine à gaz. Jeudi 19 mai, la municipalité inaugurera le deuxième, moins grand, mais encore de belle superficie — 24.000 mètres approximativement — et d’un caractère pittoresque très particulier.
Le nouveau jardin est celui des Gobelins.
Il existait déjà, allez-vous penser. En effet. Mais il n’était pas public et c’était un fouillis de jardinets privés.
Les premiers jardins ouvriers
Précisons tout de suite qu’il ne s’agit pas des jardins qui se trouvent dans l’enceinte de la manufacture et qui forment le cadre d’une charmante cité de la fin du XVIIe siècle, qu’il serait regrettable de bouleverser. Il s’agit de ceux qui étaient autrefois attribués aux ouvriers de la manufacture, pour qu’ils y fassent pousser les fleurs qui pouvaient leur servir de modèle pour leurs cartons. Ce sont les premiers jardins ouvriers qui aient été créés au monde ; le fondateur de l’institution est Louis XIV.
L’intérêt général a primé, cette fois encore, l’intérêt particulier. Après plus de deux siècles d’existence, ces jardins vont devenir publics.
Un terrain de jeux pour enfants
Très sagement, très heureusement, M. Martsloff, directeur des jardins de Paris, a voulu que soit conservé là tout ce qui était beauté: quelques grands arbres et aussi les arbres fruitiers qui, au printemps, se couvrent de fleurs roses ou blanches et font de cet endroit de Paris un bouquet ravissant de fraicheur. D’autres parties ont été transformées en bosquets, bordés de haies vives et de treillage, à la manière des jardins de Trianon. L’allée centrale a été élargie ; d’autres allées ont été ouvertes. Des plateformes, des rampes, de larges escaliers ont été construits, car ce jardin est de six mètres en contrebas des rues Corvisart et Croulebarbe. Ces travaux d’architecture remédient à l’impression d’encerclement. À une extrémité, un grand terre-plein a été aménagé pour les jeux. Des arbres ont été plantés qui formeront plus tard un rideau de verdure devant la laide muraille de ciment du nouveau garde-meuble national, malheureusement édifié entre ce jardin et la vieille manufacture.
Avec les arbres et les fleurs, l’air la lumière et aussi la gaieté se répandent largement dans cet arrondissement de Paris, naguère si déshérité.
Pierre Dubard
Sur le jardin des Gobelins :
Le verger des Gobelins (1914)
Les jardins des Gobelins menacés ? (1933)
Les textes fondateurs, loi du 6 juillet 1934 et convention :
- article 5 de la convention entre l’État et la ville de Paris pour l’organisation d’une exposition internationale en 1937 (1934)
- Texte intégral sur le site Gallica.fr
Contrairement à la légende habituellement véhiculée par le parti communiste français, René Le Gall (1899-1942), élu pour la première fois au Conseil Municipal de Paris en 1935, n'est absolument pour rien dans la création du jardin ouvert en 1938 et qui porte son nom depuis 1944,
Oasis faubourienne (1937)
Un jardin unique en son genre, celui des Gobelins, va être inauguré la semaine prochaine (1938)
Le square de la rue Croulebarbe - un des plus beaux de Paris - sera bientôt ouvert (1938)
L'inauguration vue par :
- Le Petit-Journal où l'on apprend que le mérite de la création du jardin des Gobelins revient à M. Gelis
- Ce Soir où l'on apprend que le mérite de la création du jardin des Gobelins revient à Louis XIV
- Le Populaire où l'on apprend que le mérite de la création du jardin des Gobelins revient à M. Deslandres
- L'Humanité où l'on apprend que le mérite de la création du jardin des Gobelins revient à M. Le Gall
- Le Journal où l'on apprend que ce "square fortifié" n'a pas du tout plu à M. Descaves