L'image du jour

Celui-ci était aux premières loges en cas d'innondation.
UNE ÉVOCATION DU
13e ARRONDISSEMENT DE 1860 AUX ANNÉES 30
Littérature
Zigomar
La femme rousse
Le Un et le Deux, suivis de Paulin Broquet et son lieutenant Gabriel, s'engagèrent dans l'ouverture de la trappe, juste assez large pour donner passage à un homme. Sur eux, la trappe se referma... et les barres la scellèrent.
On ne pouvait maintenant ouvrir la trappe que si ces barres de sûreté étaient manœuvrées.
Un escalier en pierre, qui tournait en colimaçon rapidement, reliait le cabinet où les quatre compères se trouvaient, aux galeries dans lesquelles tout l'heure allait s'engager la bande des Zigomar.
Ces galeries faisaient partie des anciennes carrières d'où l'on tira pendant des siècles les pierres dont s'édifia Paris.
C'était un embranchement oublié, perdu, des catacombes, dont l'entrée officielle se trouve, on le sait, assez loin de là, sur la place Denfert-Rochereau.
Les catacombes forment sous Paris un réseau d'une étendue considérable, que l'on ne connaît pas entièrement, que l'on ne repérera probablement jamais.
Le réseau officiel, réparé, arrangé, répertorié, qu'on visite, n'est pas le plus intéressant.
Il en est d'autres, séparée de lui par des écoulements, qui forment des réseaux, spéciaux, et sont autrement pittoresques et attrayants.
Quelques-uns même, car ils sont variés à l'infini, se trouvent en plus ou moins mauvais état et sont aujourd'hui des caves bien tranquilles, sous des maisons bourgeoises.
D'autres, demeurés secrets, ont gardé leur caractère dramatique de souterrains où se tiennent des assemblées dans le genre.de celle qui allait avoir lieu dans quelques instants.
Les catacombes qui commençaient sous le débit sinistre de la « Baleine » partaient dans la direction de Gentilly, mais se trouvaient coupés par des éboulements ou des travaux de maçonnerie, à la hauteur de la Butte-aux-Cailles.
Le quartier dans lequel ces catacombes passaient était alors des plus curieux pour les amateurs du Paris dramatique —du Paris spécial qui ne ressemble en rien il l'autre — au Paris-Lumière.
Autrefois la basse pègre tenait ses assises autour de Notre-Dame, dans la Cité, puis dans le quartier Saint-Séverin.
Celle qu'on montra longtemps aux grands personnages en tournée dans des établissements portant des noms effroyables n'était formée que de figurants du crime. La vraie n'était pas là.
Cette population énorme s'est éparpillée en différentes régions de la capitale. Elle prend, selon le quartier, un caractère différent.
Les malandrins de Montmartre, de Belleville ne ressemblent pas à leurs confrères du Maine ou du Sébasto. Ceux de la barrière d'Italie ne sont pas les mêmes que leurs cousins germains établis au Point-du-Jour.
Une seule chose leur est commune : le crime.
L'antre de « la Baleine » donnait sur la rue Jonas, comme nous l'avons dit. Cette rue au nom biblique se trouvait dans un grouillement de petites voies étroites, courtes, basses, tortueuses, qui forment un coin à part dans ce quartier.
La rue Jonas court entre des rues au nom luxueux rue des Cinq-Diamants, au nom champêtre Butte-aux-Cailles, réconfortant rues de la Providence, de l'Espérance. Mais la rue centrale évoque le nom du plus célèbre des bourreaux : Samson.
C'est sous ces rues que serpentaient les catacombes où les Z avaient établi leur nouveau repaire.
Pour y pénétrer, il fallait passer, comme nous venons de le voir, par la trappe qui se trouvait dans un des cabinets réservés aux « patates » de l'établissement du père Fricart.
Cette entrée, ce trou, cette ouverture carrée donnait sur un escalier qui tournait à pic autour d'un énorme pilier de pierre.
Les marches de cet escalier avaient en largeur à peine un peu plus que la longueur d'un pied d'homme.
Un seul homme y pouvait trouver place… Aucune rampe ne courait pour guider ou retenir.
L'escalier tournait deux fois sur lui-même dans une hauteur de six à huit mètres.
Il était taillé à même dans le grès que l'on exploitait dans cette carrière, et constituait un de ces tours de force de la main-d’œuvre d'autrefois, dont l'ingéniosité nous étonne toujours.
Dans la colonne de pierre d'où semblaient partir les marches, deux niches étaient creusées pour recevoir un homme. La première de ces niches se rencontrait quand la tête de celui qui descendait en tournant se trouvait en-dessous du plancher dans lequel s'ouvrait la trappe.
La deuxième guettait le nouvel arrivant trois mètres du sol du souterrain.
Cet escalier, datant de plusieurs siècles, avait servi à des confréries secrètes dont nos aïeux étaient si friands, auxquelles ouvriers, bourgeois, nobles s'affiliaient.
II était construit de façon à offrir toute garantie contre l'intrusion d'un profane.
L'homme de garde de la première niche du haut, sous le plancher, laissait passer le profane, le non-affilié, devant lui, sans la moindre objection, la plus petite demande de mot de passe, de signe de reconnaissance.
Car la règle voulait que sans question, sans arrêt, on dit le mot, on fit le signe en passant devant le premier garde.
Le garde ne reconnaissant pas l'homme qui descendait pour un compagnon, le laissait passer mais il avertissait l'homme de garde du bas.
Le profane était pris… Aucune défense n'était possible pour le malheureux sur cet escalier étroit, rapide, glissant.
Infailliblement, il était tué. Quelque part plus loin, une fosse le recevait à jamais...
En descendant cet escalier, Paulin Broquet ne pouvait s'empêcher d'admirer l'ingéniosité des hommes qui l'avaient construit et de frémir en pensant aux scènes de drame dont ces marches mortelles avaient dû être le théâtre, souvent…
Il se disait que ce soir, cette équipée commençait devenir, de sa part. extrêmement imprudente, qu'elle le mettait encore une fois la merci de son ennemi Zigomar.
Mais cette descente affirmait aussi la conviction que le Un et le Deux jouaient franc jeu avec lui, car il ne pouvait admettre chez eux une habileté poussée au point de l'abuser, lui, si complètement, sur leur sincérité.
Toutefois, dès maintenant, Paulin Broquet possédait, grâce à ses deux complices, à peu près tous les secrets de « la Baleine ». Il était, comme le Un et le Deux le lui avaient dit, à même de remplir les fonctions d'assesseur, de revêtir la cagoule noire, et de servir d'intermédiaire entre les Z et le grand Zigomar.
[...]
Le 13e en littérature
Butte-aux-Cailles
Les apaches de la Butte-aux-Cailles
par
Lucien Victor-Meunier
Très peu de Parisiens, assurément, connaissent la « Butte-aux-Cailles ». C'est très loin, très loin, passé la place d'Italie, au diable dans ces régions où l'on ne va pas...
(1907)
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Butte-aux-Cailles
par
William Cobb
(Jules Lermina)
En tournant le dos à la Seine, à la hauteur du pont des Arts, et en s'engageant en ligne droite sur la rive gauche, on laisse à droite le cimetière Montparnasse et on parvient aux anciens boulevards extérieurs. Là se trouve le boulevard d’Italie et l’ex barrière du même nom.
À deux pas, un peu sur la droite, s’étend l’un des quartiers les plus curieux et les moins connus de Paris.
C’est la butte aux Cailles.
(1873)
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De la place d'Italie à la Bièvre via l'avenue de la soeur Rosalie et la ruelle des Reculettes
par
Georges Spitzmuller et Armand Le Gay
Dans ce roman paru en feuilleton dans Le Matin, Georges Spitzmuller et Armand Le Gay emmènent leur lecteur sur la piste de M. Ducroc, chef de la sûreté, pour qui le XIIIe arrondissement n'avait pas de secret.
(1912)
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Rue du Dessous-des-Berges
par
Jules de Gastyne
Il existe à Paris, dans les quartiers perdus, des rues mornes et désertes qu'on traverse avec un sentiment de stupeur.
(1906)
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A travers la Maison-Blanche
Les apaches de la Butte-aux-Cailles
par
Lucien Victor-Meunier
Un instant plus tard, elle était dehors dans le terrain vague qui descendait en pente rapide vers la vallée de la Bièvre...
(1907)
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La poterne des Peupliers
par
J. H. Rosny Ainé
Un homme s'arrêta sur la route, près de Gentilly. Il considéra le paysage misérable et puissant, les fumées vénéneuses, l'occident frais et jeune comme aux temps de la Gaule celtique.
Si l'auteur nomme une poterne des Tilleuils, c'est bien de la poterne des Peupliers dont s'agit.
(1910)
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Rue des Peupliers
par
Jules Mary
Un des coins de Paris, misérable et sinistre. La longée des fortifications plantées d'arbres en double ou triple rangée, le côtoie pourtant de verdures plaisantes durant la belle saison, mais, en réalité, sépare pour ainsi dire cette région parisienne du reste du monde. Du haut de la rue des Peupliers...
(1908)
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Saviez-vous que... ?
Le nouveau théâtre Saint-Marcel ouvrit le vendredi 1er octobre 1869. 15 jours plus tôt, il avait reçu l’autorisation de prendre le nom de théâtre des Gobelins. Son directeur était toujours M. Larochelle. Commentant cette ouverture, le Figaro écrivait : « La salle est simple, mais confortable et bien aménagée. Tout y est neuf, lustre, rideaux, décors, etc. La première pierre de ce théâtre fut posée, il y a à peine un an, par la fille aînée du directeur, une mignonne de six ans. Cet immeuble sera sa dot. »
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Paris comptait 140 cités ou villas en 1865. Parmi celle-ci la cité Doré "formée de murailles en plâtras, en planches, occupée par les chiffonniers les plus pauvres du 13eme arrondissement" selon le guide de M. Joanne.
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Le nom d'Émile Deslandres fut donné en juillet 1936 à un tronçon de l'ancien passage Moret pour que cette rue honore l'ancien conseiller municipal, élu pour la première fois en 1905, qui représenta le quartier Croulebarbe à l'Hôtel de Ville pendant près de 30 ans.
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Les élus du XIIIe arrondissement à la Commune de Paris (période du 26 mars au 28 mai 1871 étaient : Jean-Baptiste Chardon (1839-1898, condamné à mort par contumace, le 19 juillet 1872), Emile Duval (1840, fusillé au Petit-Clamart le 4 avril 1871 alors qu'il conduisait une attaque sur Versailles), Léo Frankel (1844-1896, condamné à mort par contumace, le 19 novembre 1872), Léo Meillet (1843-1909, condamné à mort par contumace, le 17 février 1872).
Celui-ci était aux premières loges en cas d'innondation.