Fâcheuse méprise
Le Radical — 13 septembre 1892
Un cocher de la Compagnie générale des omnibus, le nommé Auguste Veladon, qui avait accompagné son attelage au Dépôt, se trouvait, la nuit dernière, à une heure du matin, rue Corvisart, lorsqu'un individu quitta le trottoir opposé, pour s'avancer au devant de lui.
— Ah ! te voilà ! il y a longtemps que l'on attend, lui cria ce dernier.
Véladon, se croyant surpris par des rôdeurs s'enfuit à toutes jambes et se rendit au poste de police des Gobelins où il arriva effaré. À peine s'y trouvait-il que l'individu qui l'avait interpellé s'y présenta à son tour.
À sa vue, Véladon bondit et l'étreignit à la gorge en l'accablant d’invectives.
— Scélérat ! canaille ! voleur, assassin, s'écriait-il sans cesser de frapper.
Les agents eurent peine à tirer de ses mains l'infortuné couvert de horions et qui, ne demandait qu'à s'expliquer.
Celui-ci, un nommé Eugène Guilloux, avait cru reconnaître un ami en la personne de Véladon, mais l'ayant vu s'enfuir à son approche, il s'était persuadé que le cocher faisait partie d'une de ces bandes dont la spécialité consiste à dévaliser les passants attardes.
Il était donc venu aussi dans l'intention de prévenir la police.
Les choses se sont arrangées dans la journée au commissariat de police de M. Perruche. Le magistrat a réconcilié Véladon avec Guilloux, qui voulait porter plainte.
Une agression, véritable celle-là, avait lieu une heure plus tard dans la même rue. Le nommé Charles Troteau, demeurant 97, boulevard d'Italie, était attaqué et dévalisé par des étrangleurs.
Il n'a pu que donner leur signalement.