Portrait d'un chiffonnier de la Butte-aux-Cailles
Extrait de : P.-L. Imbert, À travers Paris inconnu,
Paris, Georges Decaux, 1877, p.
121-122
Parmi cette intéressante population, je citerai le citoyen Gaillard, qui porte crânement sa hotte comme un carquois. Depuis que je le vois, et sans doute depuis sa naissance, il est littéralement aussi sale qu'un des insectes immondes qui se traînent dans les fissures d'égout. Sa blouse et son pantalon pouvaient être bleus quand il les acheta, je n'oserais me prononcer sur leur couleur primitive ; mais j'affirmerais, à la face de toute la gent chiffonnière, que la pluie seule les a lavés depuis dix ans, au moins, qu'il les promène sur les tas d'ordures du quartier Mouffetard. Sa casquette sans visière, grasse comme un succulent pot-au-feu, navigue sur une chevelure inculte, aux profondeurs mystérieuses. Son nez en queue de loulou, d'où jaillit un pinceau de poils, hume nuit et jour, sans éternuer, les parfums d’une barbe noire, à reflets roux, collée par mèches sur la lèvre et le menton, ce qui dénote un superbe dédain de la serviette. Ses petits yeux privés de cils, mais ombragés par de longs sourcils poudrés de pellicules ont l'éclat d'une luciole qui brille d'amour dans la broussaille. Je ne parlerai pas de ses mains, et cependant, au bout des doigts, Gaillard a quelque chose de plus dégoûtant que tout le reste, puisqu'il ne porte pas de chemise : ce sont les ongles. Oh ! ces ongles j'en ai eu le cauchemar pendant quinze nuits !...
Chiffons et chiffonniers dans le 13e
Territoire en marge de la capitale, le 13e accueillait d'importantes communautés de chiffonniers qui se répartissaient en plusieurs points de l'arrondissement. Ces activités commencèrent à décliner à partir des années 1880 notamment à la suite de l'arrêté du 24 novembre 1883 dit "arrêté Poubelle", entré en vigueur le 15 janvier 1884, organisant l'enlèvement des ordures ménagères et prescrivant la mise en place par les propriétaires d'immeubles de récipients ad hoc à disposition de leurs locataires.
Les lieux
- La Cité Doré par Alexandre Privât d'Anglemont (1854)
- Le Cabaret du Pot-d’Étain (1864)
- La rue Harvey (1889)
La "Cité Tolbiac"
L'expression "Cité Tolbiac" est apparue dans la presse uniquement en août 1898. L'entrée de cette cité était peut-être située dans l'impasse Sainte-Marie, voie de 35 mètres sur 4 débouchant dans la rue de Tolbiac (impasse Tolbiac avant 1877).
- Les concierges des chiffonniers (Le Petit Journal — 5 août 1898)
- La Cité Tolbiac (La Patrie — 16 août 1898)
- La cité Tolbiac (Le Figaro — 16 août 1898)
- L'Exode des « Biffins » (Gil Blas — 16 août 1898)
- Le monde de la hotte (Le Gaulois — 20 août 1898)
Les gens
- Chiffons et chiffonniers (1872)
- Les chiffonniers de la Butte-aux-Cailles (1875)
- Portrait d'un chiffonnier de la Butte-aux-Cailles (extrait du précédant - 1877)
- La villa des chiffonniers (1897)
L'arrêté Poubelle et ses conséquences
L'arrêté du préfet de la Seine organisant l'enlèvement des ordures ménagères via une règlementation des réceptacles et des heures de dépôts et de ramassage allait mettre à mal la corporations des chiffonniers. Quelques journaux s'en émurent et organisèrent des campagnes de soutien aux "chiffonniers affamés à plaisir par l'administration" selon l'expression du Gaulois qui ne faisait pas dans la modération sur cette affaire.
- Arrêté du 23 novembre 1883 dit "arrêté Poubelle" (1883)
- Les chiffonniers de Paris (Le Gaulois — 17 janvier 1884)
- Une première distribution - Ve et XIIIe arrondissement (Le Gaulois — 23 janvier 1884)
- Conseil municipal – Séance du 8 février (Le Gaulois — 9 février 1884)
- L’enlèvement des ordures ménagères (Le Gaulois — 26 février 1884)
Dans la littérature
