Littérature



La criminelle

par Jules Lermina

I
(suite)
 

Mais soudain cette femme, qui semblait si frêle, si faible, se redressa, et un éclair de résolution, presque de défi, passa dans ses yeux.

Et comme à ce moment, de petits coups heurtant la porte de sa chambre, une voix enfantine cria 

 — Petite mère ! Ouvre-moi !

Madame Dolé, du revers de sa main, essuya ses paupières, courut ouvrir en saisissant dans ses bras le petit Jacques, son fils ; elle le serra contre sa poitrine avec une énergie presque sauvage.

A quelque prix qu'il lui fallût racheter le repos de son mari, de son enfant, elle était prête.

Le bébé était blond et rose, bien portant. Il tenait du père qui était fort, ouvrier dont la foi avait fait un artiste. Seulement, à bien regarder l'enfant, on eût surpris dans ses yeux une sorte d'exaltation qui le rattachait, sinon physiquement, tout au moins moralement, à sa mère.

— Petite mère, dit Jacques, Jacquet, comme on l'appelait, veux-tu que j'aille passer la journée chez grand'mère ?..

— Est-ce qu'elle t'attend ?..

— Oui... elle m'a dit comme ça qu'il y aurait des camarades pour jouer avec…

La mère, — que cet arrangement mettait à l'aise, — ne put cependant se défendre d'une coquetterie jalouse.

— Et si je te demandais de rester avec moi ?.. fit-elle en attirant Jacques sur ses genoux.

Lui, passa ses bras à son cou et, câlin, gazouilla avec ce zézaiement qui plaît aux mères :

— Tu sais bien que j'aime mieux toi !..

Puis, la regardant :

— Mais, dis donc, petite mère. pourquoi donc que tu as pleuré ?

— Moi ! tu te trompes ! fit Pauline en le repoussant.

— Ah ! tant mieux ! je ne veux pas qu'on te fasse de peine… ni à papa…

Madame Dolé appela la bonne. C'était une grosse Picarde, indifférente, mais trouvant la place bonne. La maison n'était pas bien riche, mais on y était tranquille.

Elle reçut avec impassibilité les instructions que lui donnait Pauline. Il faisait froid. La pluie menaçait. Il fallait bien envelopper l'enfant, se défier du brouillard.

— C'est grand'mère qui va être contente, fit l'enfant.

— Pourquoi donc ? demanda Pauline, sans attacher d'ailleurs à sa question aucune importance.

— Parce que, reprit le gamin en baissant la voix, grand'mère croit que tu n'aimes pas que j'aille chez elle.

— Veux-tu te taire, petit démon ! s'écria la Picarde qui n'aimait pas les histoires.

Madame Dolé avait embrassé Jacques.

— Ta grand'mère se trompe. C'est que je voudrais ne jamais te quitter ; voilà tout !..

— N'oublie pas ma balle ! cria Jacques à sa bonne qu'il entraîna.

Madame Dolé resta seule. Elle avait encore aux lèvres le sourire qu'y avait posé le doux babil de l'enfant.

C'était vrai, pourtant, que grand'mère et petite mère étaient quasi jalouses l'une de l'autre.

Après tout, ce n'était pas bien grave.

La mère de M. Dolé était une femme à l'esprit un peu étroit, mais sentimental. Et, si Pauline avait à souffrir de ses défauts, l'enfant bénéficiait de ses qualités. C'était une large compensation.

D'ailleurs, madame Dolé analysait peu ses impressions.

Son caractère bienveillant ne conservait pas d'empreintes rancunières. Ne haïssant pas, —étant trop faible ou trop bonne, — elle n'eût pas, compris qu'on la haït.

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Jules Lermina (1839-1915)

Jules Lermina, né le 27 mars 1839 à Paris et mort le 23 juin 1915 à Paris, fut un romancier et journaliste. Il contribua à la création et au fonctionnement de la Bibliothèque populaire des Amis de l’Instruction du Treizième arrondissement qui était installée dans la Cité des Gobelins.
Lermina avait théorisé, dès 1861, un vaste projet de bibliothèques de quartier : <br>"Notre Bibliothèque contiendra tous les livres d'un usage journalier, toutes les œuvres qui peuvent être d'un secours réel au travailleur consciencieux : c'est dira qu'elle réunira, autant du moins que ses ressources le lui permettront : Les littératures française et étrangère, moderne et ancienne ; l'histoire ; la morale et la philosophie ; l'économie sociale et politique ; les sciences abstraites ; la linguistique.
Parmi les publications modernes, elle rejettera les romans, et autres œuvres d'humour (autrement dit de blague)".

Madame Sept-Quatre (1873, sous le nom de William COBB)

Les loups de Paris (1876)

La Criminelle (1881)

Le 13e en littérature

La Cité Jeanne-d'Arc

Un gosse

par
Auguste Brepson

La cité Jeanne-d'Arc est ce vaste ensemble de bâtiments noirs, sordides et lugubres percés comme une caserne de mille fenêtres et dont les hautes façades s’allongent rue Jeanne-d'Arc, devant la raffinerie Say.

(1928)

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Butte-aux-Cailles

La vague rouge

par
J. H. Rosny Ainé

L'homme suivit d'abord la rue de Tolbiac, puis s'engagea par ces voies ténébreuses, bordées de planches, de lattes et de pieux, qui montent vers la Butte-aux-Cailles. Les oiseaux des réverbères dansaient dans leurs cages de verre. On apercevait des terrains fauves, des chaînes de bosselures, des rampes de lueurs, des phares dans un trou du ciel, et, du côté de la Butte, un nuage de feu pâle évaporé sur Paris...

(1910)

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Le quartier de la Gare

Monsieur Lecoq

par
Émile Gaboriau

Le 20 février 18.., un dimanche, qui se trouvait être le dimanche gras, sur les onze heures du soir, une ronde d’agents du service de la sûreté sortait du poste de police de l’ancienne barrière d’Italie.
La mission de cette ronde était d’explorer ce vaste quartier qui s’étend de la route de Fontainebleau à la Seine, depuis les boulevards extérieurs jusqu’aux fortifications.
Ces parages déserts avaient alors la fâcheuse réputation qu’ont aujourd’hui les carrières d’Amérique.

(1869)

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Butte-aux-Cailles

Le trésor caché

par
Charles Derennes

Depuis toujours on habitait, mon père et moi, sur la Butte-aux-Cailles ; encore aujourd'hui, ce quartier-là n'est guère pareil à tous les autres. Mais si vous l'aviez vu du temps que je vous parle ! Des cahutes s'accrochaient à la butte comme des boutons au nez d'un galeux ; ça grouillait de gosses et de chiens, de poux et de puces...

(1907)

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La prairie de la Glacière

Sans Famille

par
Hector Malot

C’est un quartier peu connu des Parisiens que celui qui se trouve entre la Maison-Blanche et la Glacière ; on sait vaguement qu’il y a quelque part par là une petite vallée, mais comme la rivière qui l’arrose est la Bièvre, on dit et l’on croit que cette vallée est un des endroits les plus sales et les plus tristes de la banlieue de Paris. Il n’en est rien cependant, et l’endroit vaut mieux que sa réputation.

(1878)

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Butte-aux-Cailles

Bouscot

par
Gaston Chéreau

Il habitait tout là-bas, aux Gobelins, dans un pâté de bicoques en carton que bousculent des rues à noms magnifiques rue des Cinq-Diamants, rue de l'Espérance, rue de la Butte-aux-Cailles…

(1909)

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Quartier de la Gare

Un crime passionnel

par
J. H. Rosny

Je songe à l'histoire de la petite Jeannette, qui vivait dans le noble quartier de la Gare.

(1908)

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Saviez-vous que... ?

La rue du Tibre, dans le quartier Maison-Blanche, a été ouverte sur l'emplacement d'une voirie d'équarrissage, elle a porté le nom de rue de la Fosse-aux-Chevaux, puis du Tibre, à cause de la Bièvre autour de laquelle ont été groupés des noms de fleuves.

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La création de la caserne des pompiers de Port-Royal fut décidée en 1883.

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En 1930, les Primistères parisiens avaient des magasins aux adresses suivantes : Rues, des Cinq-Diamants, 33 et 56 ; du Château-des- Rentiers, 54 et 135 ; Bourgon, 19 ; Nationale, 151 ; du Moulin-des-Prés, 9 ; de Patay, 92 ; Albert, 67 ; Baudricourt, 75 ; avenues : d'Italie, 52, 100, 198 et 180; d'Ivry, 41 ; de Choisy, 39 ; de Tolbiac, 169; boutevard de la Gare, 132 et 171.

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La Compagnie Générale des Omnibus remettait en service, le lundi 22 novembre 1920, la ligne d'omnibus automobiles K, Place de Rungis-Place de la République. Rappelons que cette ligne desservait : la Place d'Italie, la Halle aux Vins, l'Ile Saint-Louis et la Place des Vosges.

L'image du jour

Place Pinel