Au cabaret de la mère l’Hercule
Le Figaro — 6 février 1873
Tout à l'extrémité du 13e arrondissement, rue du Pot-au-Lait, 44, est un cabaret fréquenté, par les ouvriers des manufactures environnantes. Tout s'y passe généralement en famille, et si, par hasard, quelqu'un fait un peu de bruit, la patronne du lieu, madame Rozoy, dite la Mère l'Hercule, se charge de rétablir la paix. Il faut dire que madame Rozoy a fait autrefois, sous le nom de la Belle Artésienne, les délices des foires de banlieue, et qu'elle a encore aujourd'hui la poigne assez solide pour tenir tête aux ivrognes les plus tapageurs.
Hier soir, trois individus, après avoir largement festoyé, voulurent partir sans payer. Mais là mère l'Hercule était là, le poing sur la hanche :
— Pas de crédit, mes bibis, dit-elle ; si vous n'avez pas de monnaie, laissez vos blouses, je ne veux pas être levée.
Une lutte s'engagea. La mère l'Hercule se comporta vaillamment ; mais accablée sous le nombre, fut renversée et gravement blessée.
Deux des individus prirent la fuite., Le troisième, un nommé Devaux, chiffonnier, aux vêtements duquel la virago s'était cramponnée, a été arrêté et livré à la justice.

Aujourd'hui, c'est le croisement des rues Brillat-Savarin et des Orchidées. Le sol est exhaussé de près de 7 mètres. Le cabaret de la mère l'Hercule devait êtfre dans ce secteur.
Le Figaro semble avoir été le seul journal à rapporter ce fait divers. On ne peut exclure
que le rédacteur est quelque peu enjolivé les faits. mais la présence des nombreux cabarets et marchands de vins dans
le secteur est avérée.
(Le titre a été ajouté)
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