La Butte-aux-Cailles - Petit-Parisien — 30 nov. 1877
La Butte-aux-Cailles
Le Petit-Parisien — 30 novembre 1877
Paris en s'agrandissant tout à coup, en 1862, avait englobé toute une banlieue
très vivante et qui n'était en quelque sorte que le faubourg de tes faubourgs.
Mais à côté de ces quartiers populeux et industriels, la nouvelle ceinture des
mortifications dotait Paris de vastes régions presque complétement inhabitées
le versant nord de la butte Montmartre, les carrières d'Amérique, la plaine
de Montceaux, le plateau de Montsouris et enfin la Butte-aux-Cailles.
Le versant nord de la butte Montmartre, dans le dix-huitième arrondissement,
commence à s'humaniser, grâce à la rue Cardinet et au boulevard Ornano; les
carrières d'Amérique, dans le vingtième arrondissement, disparaissent par le
tracé de la rue des Pyrénées et de la rue Sorbier; la plaine de Monceaux a fait
place au quartier splendide que l'on sait; il ne restait plus guère que le plateau
de Montsouris et la Butte-aux-Cailles à « défricher. »
Situé sur les confins du XIVe et du XIIIe arrondissement l'ancien quartier
de la Glacière est, ou plutôt était, Il y a peu de temps, un des côtés les plus
curieux du nouveau Paris. Las deux bras de la Bièvre s'enchevêtrant, à peine
ombragés par quelques maigres peupliers, dans les replis escarpés de la Butte
aux-Cailles, vont déverser leurs eaux fangeuses et puantes dans les cuves des
tanneurs établis sur leur parcours, et de là dans la Seine.
Au loin, pour horizon, l'hospice et le fort de Bicêtre, la redoute des Hautes
Bruyères; d'un autre côté, Paris tout entier, que l'œil découvre depuis la place
du Trône jusqu'à la place de l'Etoile.
Entre les sinuosités arides d'un terrain crayeux et marneux, deux mares,
grande flaques d'eau, qui étaient jadis exploitées en glacières, quand l'hiver
le permettait.
Çà et là, quelque hutte, une masure mal équilibrée, au toit de chaume, laisse
pénétrer le regard à travers ses lattes mal jointes et son crépi désagrégé,
dans un champ inculte une chèvre chétive semble mendier à la terre avare de
trop rares brins d'herbe desséchée. Une rue, de chaque côté de pauvres maisons
à un ou deux étages, devant un jardinet où fleurit le tournesol ; les barreaux
de bois des treillages enserrés dans la mauve sauvage et dans la vigne vierge.
Les habitants des chiffonniers, des portefaix, des bohèmes, dépenaillés,
vivant au hasard et du hasard les cabarets, des bouges les lieux de plaisir,
des musettes où une mise décente n'est pas de rigueur. Très pittoresque, mais
pas très rassurante, cette semi-solitude. Et cependant, de par l'annexion, elle
fait partie intégrante de la « capitale du monde. »
Les grands travaux de voirie entre pris depuis plusieurs années vont totalement
modifier son aspect. Déjà le parc de Montsouris a changé en jardins, sinon merveilleux,
du moins très présentables, l'ancien plateau, si aride, si désolé; les rues
d'Alésia et de Tolbiac vont compléter cette transformation du côté de la Glacière
et de la Butte-aux-Cailles.
La rue d'Alésia sera une large et belle voie.
Commençant à l'extrémité de la rue de Vouillé, à l'endroit même où la voie
du chemin de fer de l'Ouest (rive gauche) traverse cette rue, elle se continue
jusqu'à la rue de la Santé, après avoir passé par l'avenue du Maine, l'avenue
d'Orléans, la rue de la Tombe-Issoire et longé le granit mur qui entoure les
bâtiments de l'asile Sainte-Anne. À cette extrémité même, c'est-à-dire à l'endroit
où elle aboutit à la rue de la Santé, cette longue rue aura encore un prolongement
dans la nouvelle voie qu'on est en train de jeter par-dessus la Bièvre, à mi-côte
de la Butte-aux Cailles.
Quelques mètres encore de terre du côté de la rue du Moulin-des-Prés et une
pente douce jusqu'au niveau de la rue de la Santé, la nouvelle vole sera virtuellement
ouverte, la vallée comblée et deux quartiers, absolument séparés l'un de l'autre
il y a à peine quelques mois, réunis et pouvant communiquer l'un avec l'autre
en quelques minutes.
La rue de la Providence a à peu près disparu dans le tracé; elle va être
absorbée par la grande rue de Tolbiac. Quant à la rue de l'Espérance, elle est
percée de part en part.
À la hauteur de la rue du Moulin- des-Prés, force a été de construire une
voûte de façon à faire passer la nouvelle vole sur l’ancienne.
Le Pont de la rue de Tolbiac au-dessus de la rue du Moulin-des-Prés (vue
vers le sud) Source : Musées de la Ville de Paris (interprétation)
Cette voûte a de vingt-cinq à trente mètres de long sur douze mètres de largeur
environ. Deux escaliers adjacents au mur de soutènement de la voûte sont déjà
terminés et serviront à donner accès la partie supérieure dans la rue de Tolbiac.
D'ici à quelques semaines, il ne sera pas encore possible de passer sur la
nouvelle voûte Il faut encore, auparavant, que la machine à vapeur amène bien
des chariots de terre avant que le nivellement de la pente soit obtenu; on a
commencé, du reste, ouvrir la tranchée qui sépare la rue du Moulin-des-Prés
de l'avenue d'Italie, et le tronçon sera très promptement accessible, jusqu'au
petit passage Vandrezane.
La voute passant au-dessus de la rue du Moulin des Prés. Au
fond, le puits artésien de la Butte-aux-Cailles
Lorsque ces travaux intéressants seront terminés, Paris aura littéralement
conquis par des terrains sans valeur, et qui n'en pouvaient avoir dans leur
état primitif, tout un immense quartier qui, peut-être, dans quelques années,
ne le cédera en rien à ses superbes devanciers.
On a mis récemment à l'enquête un projet d'agrandissement de la Gare du chemin de fer d'Orléans, à Paris, qui consiste à étendre les dépendances de cette gare jusqu'au quai d'Austerlitz, par l'annexion de tout l'emplacement compris entre ce quai, la rue Papin et le boulevard de l'Hôpital. (1862)
Le treizième a toujours été la cité des pauvres. Il sue encore la misère avec ses îlots de maisons délabrées… avec la rue du Château-des-Rentiers, ô ironie, avec la Butte-aux-Cailles chère à Louis-Philippe. Et comme la misère va de pair avec la douleur, beaucoup d'hôpitaux, la Salpêtrière, la Pitié, Broca, Péan, des asiles, des refuges. Sur 33.500 électeurs, 28.000 paient de 500 à 1.200 francs de loyer par an. Au prix actuel du gîte, ces chiffres ont une triste éloquence ! On ne s'étonnera pas si le treizième est politiquement très à gauche… et même à l'extrême gauche. (1927)
Tandis que les chauffeurs ne pourront claironner ou trompeter par les rues de Paris, des escouades de bruiteurs autorisés continueront, embouchure aux lèvres, leur pas accéléré quotidien dans les rues du quartier de la Maison-Blanche en général, boulevard Kellermann en particulier. (1929)
Dans une semaine ou deux, on inaugurera la grande piscine de la Butte aux Cailles. C'est un établissement vraiment remarquable, de briques et de mortier, aux revêtements vernissés blancs, dominé d'une immense cheminée en ciment armé, de grande allure avec sa quadrature de colonne droite évidée aux angles, lesquels sont ainsi arrondis. (1924)
Dimanche, dans la nuit, un craquement sinistre a éveillé les locataires d'un des vieux immeubles de cette rue. une maison d'un étage, portant le numéro 10. D'un coup la maison s'était lézardée du haut en bas. menaçant de s'effondrer. (1929)
Le quartier de la Gare est en émoi. A la suite de perturbation du sol, peut-être aussi de fissures de conduites d'eau et d'infiltrations, la plupart des immeubles de la rue Charles-Bertheau, dont certains sont neufs, menacent ruine (1937)
Savez-vous ce que c'est qu'un Bijoutier ?... C'est un de ces industriels qui achètent aux laveurs de vaisselle des restaurants les débris de viande cuite jugés indignes d'être offerts à la clientèle, et qui vendent ces débris, connus sous le nom d'arlequins, aux pauvres gens des quartiers populeux. Or, depuis quelque temps, les étalages des bijoutiers du marché des Gobelins étaient mieux fournis que d'habitude... (1872)
C'est derrière la mairie du treizième arrondissement, dans le vieux marché des Gobelins, que la jeunesse des Beaux-arts avait organisé hier soir le bal annuel des Quat'z'Arts. (1914)
Une rumeur étonnante et capable d’alimenter toutes les conversations circulait, hier après-midi vers 5 heures, dans le quartier de la Maison-Blanche. Des terrassiers, en creusant pour faire une cour, avaient découvert des ossements... (1923)
Palmyre est une grande brune, assez bien de sa personne, qui tous les soirs arpente l'avenue de Choisy en quête de clients généreux. Adolphe Verrier, chauffeur dans une usine de banlieue, la connaissait bien de vue, mais jamais il n'avait osé l'aborder.
On donne à la rue de la Croix-Rouge la dénomination de Domrémy. village du département des Vosges, où naquit Jeanne d'Arc; la route de Fontainebleau devient route d'Italie, la place de la barrière d'Ivry devient la place Pinel... (1868)
La cité Jeanne-d'Arc vient encore d'être le théâtre de scènes sanglantes. Hier vers trois heures et demie de l'après-midi un malfaiteur dangereux, frappé de dix ans d'interdiction de séjour, Léon Becquet, âgé de vingt-sept ans, se prit de querelle avec un autre individu, Adolphe Douraud, dit « Bibi », au sujet d'une femme, une fille soumise dont le casier judiciaire est orné de vingt-neuf condamnations.
Si le vieil hôtel de Sens est, sur la rive droite de la Seine, un édifice curieux à voir, deux hôtels non moins anciens et tout aussi intéressants s'offrent sur la rive gauche, dans le quartier des Gobelins, aux yeux des amateurs du gothique. (1878)
Alfred Thomas, âgé de quarante-deux ans, est un brave homme de menuisier. Établi, depuis six ans, rue de Tolbiac, il s'efforce, avec zèle et ponctualité, de contenter sa petite clientèle.
Le boulevard Saint-Marcel prend naissance au boulevard, de l'Hôpital, vis-à-vis la Salpêtrière, et va aboutir en ligne directe à l'avenue des Gobelins, où il se rencontre avec les boulevards Arago et Port-Royal pour former un spacieux rond-point. (1882)
Hier matin, la rue de la Glacière était mise en émoi. Quatre gardiens de la paix et deux inspecteurs de la Sûreté sortaient de la maison portant le numéro 37, en traînant, en portant plutôt un individu qui se défendait avec une énergie farouche.
Ce n'est jamais sans un sentiment de gêne, pour ne pas dire de honte, qu'en arrivait aux portes de la grande, cité parisienne, on franchit cet espace de 250 mètres de largeur qui longe encore en une ceinture presque continue les fortifications et qu'on appelle la Zone. (1932)