Dans une semaine ou deux, on inaugurera la grande piscine de la Butte aux Cailles. C'est un établissement vraiment
remarquable, de briques et de mortier, aux revêtements vernissés blancs, dominé d'une immense cheminée en ciment armé,
de grande allure avec sa quadrature de colonne droite évidée aux angles, lesquels sont ainsi arrondis.
L'entrée principale est sur la place Paul-Verlaine. La place Paul-Verlaine coupe la rue Bobillot, qui appartient
au treizième arrondissement, aux alentours de la place d'Italie.
Au vrai, c'est au-dessus des Gobelins, un quartier assez peu connu sous le nom de La Maison-Blanche, qui, avec La
Butte aux Cailles dominait la vallée de la Bièvre à son entrée dans Paris et avait vue sur les étangs de La Glacière.
La Bièvre
La petite rivière, chantée par Hugo Delvau, décrite par Parent-Duchâtelet et dont tant de peintres et de dessinateurs
ont croqué les aspects, n'existe plus que de souvenir. C'est en vain que l'on voudrait retrouver, depuis son vallon
orignal, les moulins qu'elle faisait tourner : où sont le moulin à papier de la fabrique Boisson à La Meulière ; et
ceux de Jouy activés par le génie d'Oberkampf ; et sa concurrence des toiles peintes de Bièvre fondée par Dolp ? Plus
de moulins à farines à Berny et à Cachan; celui de l'Hay s'effondre lamentablement, au bord de la route de Fresnes.
Il n'en existe plus à Arcueil. Où est le moulin de la blanchisserie des hôpitaux, dans l'enclos de la Salpêtrière
? Et quant à celui du Moulin des Prés, son nom est encore donné à une rue qui va disparaître.
La rue du Moulin-des-Prés
Sur la gauche de la place Paul-Verlaine, une sorte de chemin rustique descend entre des murs anciens. A droite, un
bel hôtel particulier avec une large cour ; les toits dominants sont en terrasse à l'italienne. Le côté inverse est
constitué par des murs de soutènement épaulant des jardins paraissant dégringoler. On arrive à une sorte d'esplanade
formée de remblais sur lesquels pousse une herbe lépreuse, vert-de-grisée. Ce terre-plein encage un vieux petit pavillon
encore habité, et s'en va tomber à pic sur le caniveau de l'ancien passage Vandrezanne.
Aussitôt, devant ces murailles basses, percées de petites fenêtres, mais dont on cherche en vain l'entrée qui est
sur une autre voie, isolée du passage par une lourde porte charretière verrouillée et barrée, on a un souvenir lancinant
de quelque chapitre de Huysmans. Le disciple de Zola a dû suivre par là quelque brocheuse ou relieuse de l'atelier de
ses parents, rue de Sèvres. C'est avec lui que l'on suit les lignes cahotantes des allées de terre menant à des bicoques
exceptionnelles, avec balcons en bois vermoulus et disjoints, à des cassines de torchis et de plâtras, séparées par
des murs à hauteur d'appui! où s'alignent les pots de balsamines et de tulipes. Sous un toit goudronné, un coq chante
éperdument, en ramassant ses-poules de la pointe de l'aile... Un coq ! nous ne sommes pas à Paris ! La Préfecture de
police ferait fermer le poulailler.
Le puits artésien
Du côté de la rue de Tolbiac, ce passage est sans issue. On dévale, la pente de la rue du Moulin-des-Prés,
puis on la remonte jusqu'à la rue Bobillot. Sur la place, quelques marches de nivellement et dans le sol même la plaque
indiquant où se trouve le puits artésien, dont la pyramide de bois a disparu.
Pendant un temps, la municipalité de Paris crut qu'elle trouverait dans sort sous-sol, l'eau indispensable à ses
besoins permanents. A la suite d'Arago, des savants et des ingénieurs prouvèrent la valeur de l'indication, Il y eut
le puits de Grenelle, foré en 1833 où se trouve actuellement le monument de Pasteur, place de Breteuil. Puis, en 1855,
celui de Passy, bouillonnant dans le square Lamartine, avant que d'alimenter les lacs du Bois de Boulogne, d'où sa vapeur
alcaline surgit opaque en hiver. Enfin, en 1863, d'après le même programme, on descendit les mèches à la Chapelle et
à la Butte aux Cailles. La profondeur à atteindre touchait à 600 mètres pour rencontrer la nappe, la même que celle
de Grenelle et de Passy.
En novembre 1872, au moment où la sonde atteignait 532 m. 75, dans le tréfonds de la Butte aux Cailles, des difficultés
de règlement surgirent entre l'entreprise puisatière et l'Administration. L'opération resta, en suspens pendant vingt
ans.
On la reprit en 1893, puis il y eut des accalmies de travaux en 1901 ; enfin le 19 octobre 1903, le chantier
fut remis en activité jusqu'au 17 mars 1904, où. l'on atteignit la cote de 580 m. 40 et où le jaillissement se produisit
d'une manière ininterrompue.
L'inauguration solennelle eut lieu le 7 août 1904.
Il en avait coûté un million. La piscine blanche coûtera 4 millions et demi.
C'est après vingt ans que l'installation hydraulique et son usage hygiénique pour les douches et les bains en eau
courante, auront trouvé leur formule définitive.
Mais peu après, la Butte aux Cailles aura disparu.
Ce n'est qu'en 1867, que la route de Fontainebleau devint officiellement l'avenue d'Italie.
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Le 26 octobre 1923, l'automobile de M. Naudin, conseiller d'Etat, ancien préfet de police, entrait en collision avec un taxi à l'angle de l'avenue des Gobelins et du boulevard Saint-Marcel. Dégats matériels uniquement.
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La voie qui prit le nom d'avenue Edison en 1932, devait, initialement relier la place Nationale et la place d'Italie. Le projet fut brutalement abandonné, ce qui explique l'aspect particulier de l'avenue à proximité de la place d'Italie où quelques dizaines de mètres seulement rester à percer.
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Le raccordement du boulevard Kellermann aux rues Damesme et du Moulin-de-la-Pointe par des rampes à pente douce et par un escalier vers la vallée de la Bièvre fut décidé en 1882 en même temps que l'on décida de porter sa largeur au cabarit standart de 40 mètres.
L'image du jour
La Zone à la porte de Bicêtre
Talus et fossés des fortifications étaient occupés par des jardins plus ou moins sauvages, la zone non aedificandi était peuplée par une population vivant dans des baraquements, des cahuttes ou encore des roulottes. La porte de Bicêtre était une des plus petites de Paris. Elle communiquait, comme la poterne des Peupliers, avec Gentilly, la commune du Kremlin-Bicêtre n'ayant été constituée qu'en 1896 par le détachement de territoires de Gentilly. C'est en 1912 que fut achevé, l'immeuble destiné aux familles nombreuses construit juste en vis-à-vis de la porte de Bicêtre. Il était alors situé entre des usines dont une manufacture de chaussures. ♦