Littérature



"Un gosse"

roman par Auguste Brepson

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Deuxième partie

XIII

Nous avons eu tous en rentrant en classe une surprise réjouissante. Nous n'aurons pas affaire au frère Alexandre ! Il a changé d'école, et celui qui le remplace — frère Henri — nous parait de bon augure.

C'est un garçon de vingt-cinq à trente ans, à la figure douce et nonette, à la voix blanche et aux gestes courts.

Quand nous disons tout haut notre prière, à genoux sur les banquettes, nous ne pouvons nous empêcher d'admirer avec quel air de ferveur il fait la sienne, face à nous, les yeux clos, les mains jointes, les lèvres balbutiantes.

Nous croyons que celui-là ne sera pas méchant. Mais il nous faut bientôt déchanter ; et nous nous apercevons vite que s'il ne fait de bruit... il n'en frappe que plus fort !

Il a des colères muettes où sa face blêmit, ses narines se dilatent, ses lèvres frémissent, il vous empoigne solidement la main et vous y assène, les mâchoires craquantes, des coups de règle qui vous la tienne longtemps chaude. Ou bien, s'il vous surprend à jouer aux plumes, après maints détours, il vous arrive par derrière, et vous interrompt par une grêle de claques d'où vous sortez tout ahuri.

Mais où nous le redoutons le plus, c'est quand il nous tire les « guiches », là…, tout près de l'oreille. Pour qu'il nous lâche nous supplions : « Frère !... frère !... » et grimpons sur le banc, sur le pupitre ; nous monterions jusqu’au plafond , jusqu’au ciel, si nous le pouvions !

On se fait tondre mais il trouve toujours une petite touffe qui lui suffit.

Néanmoins, il ne s’avise plus de toucher Brignolet. Avant même que la calotte soit tombée, celui-ci se met à hurler comme si on le saignait, et continue pendant des heures.

Nous avons voulu l’imiter mais nous n’avons pas pu si longtemps.

Cependant Frère Henri récompense autant qu’il châtie, et, s’il fait pleuvoir les beignes et les pensums sur les mauvais élèves, par contre il inonde les bons d’images pieuses et de bons-points.

Et ces images, il vous les met dans votre pupitre, après la classe, pour jouir le lendemain matin de votre surprise. Vous comptez vos bons points, et vous vous extasiez — on le fait exprès car on sent qu'il vous observe — sur des Sainte Vierge en manteau bleu, foulant de leurs pieds nus un serpent qui se tortille sur un globe terrestre, des saint Jean-Baptiste couverts de peau de bique, appuyés sur une croix grossière et qui lèvent le doigt, des Cœur de Jésus écarlates, cerclés d'une couronne épineuse, et d'où jailli comme d'un pot une touffe de flammes jaunes.

Je me souviens le jour où je fus nommé premier — la seule fois du reste — de la belle image que je trouvai dans mon pupitre. Il n'y en avait qu'une, mais elle était magnifique. Elle représentait l'étable de Bethléem avec le petit Jésus dans une gloire, tout potelé, tout rose, entouré du bœuf, de l'âne, de la Sainte Vierge, de saint Joseph et de tous les Rois Mages, prosternés dans leurs manteaux éclatants, parsemés de fleurs d'or — le tout dans un joli cadre de bristol gaufré, bordé de dentelle. Ému j'allai remercier le frère, et revins m'asseoir à mon bureau, sur l'estrade, tout fier de dominer la classe.

Mais je n'eus guère le temps de savourer mon triomphe, car, le lendemain il y eut, à la suite de je ne sais quelle récapitulation de bonnes-notes, un chambardement qui me mit en plein milieu des autres, tandis que Tixier trônait de nouveau au pupitre du premier.

C'est le fils du directeur d'une usine voisine. Il est le « chouchou » des frères, auxquels il apporte de magnifiques gerbes pour leurs chapelles, Néanmoins, c'est, un élève remarquable et il est bien rare qu'il ne soit pas premier.

Cependant, il arriva un jour, de la troisième, pour se mesurer avec lui, un adversaire redoutable, en la personne d'un tard venu, un pauvre petit diable appelé Martial, dont les souliers bâillaient et le tablier faisait la grimace.

À partir de ce moment ce fut un véritable tournoi, où bientôt Tixier succomba. L'autre était fort en tout et il fallut bien que le frère bon gré mal gré, et en dépit de la mine longue de son favori, l'assît à côté de lui, au pupitre d'honneur, ou Martial continua à se maintenir solidement.

Cependant, un matin, on ne le revit plus. Son père, un cérusier, venait de mourir, et sa mère, obligée d'aller en journée, le laissait à présent à la maison pour garder son petit frère et sa petite sœur.

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Le 13e en littérature

Butte-aux-Cailles

Le trésor caché

par
Charles Derennes

Depuis toujours on habitait, mon père et moi, sur la Butte-aux-Cailles ; encore aujourd'hui, ce quartier-là n'est guère pareil à tous les autres. Mais si vous l'aviez vu du temps que je vous parle ! Des cahutes s'accrochaient à la butte comme des boutons au nez d'un galeux ; ça grouillait de gosses et de chiens, de poux et de puces...

(1907)

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La prairie de la Glacière

Sans Famille

par
Hector Malot

C’est un quartier peu connu des Parisiens que celui qui se trouve entre la Maison-Blanche et la Glacière ; on sait vaguement qu’il y a quelque part par là une petite vallée, mais comme la rivière qui l’arrose est la Bièvre, on dit et l’on croit que cette vallée est un des endroits les plus sales et les plus tristes de la banlieue de Paris. Il n’en est rien cependant, et l’endroit vaut mieux que sa réputation.

(1878)

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Butte-aux-Cailles

Bouscot

par
Gaston Chéreau

Il habitait tout là-bas, aux Gobelins, dans un pâté de bicoques en carton que bousculent des rues à noms magnifiques rue des Cinq-Diamants, rue de l'Espérance, rue de la Butte-aux-Cailles…

(1909)

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Quartier de la Gare

Un crime passionnel

par
J. H. Rosny

Je songe à l'histoire de la petite Jeannette, qui vivait dans le noble quartier de la Gare.

(1908)

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La rue Jonas

Zigomar - La femme rousse

par
Léon Sazie

L'antre de « la Baleine » donnait sur la rue Jonas, comme nous l'avons dit. Cette rue au nom biblique se trouvait dans un grouillement de petites voies étroites, courtes, basses, tortueuses, qui forment un coin à part dans ce quartier.

(1910)

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La Cité Jeanne d'Arc

Les mémoires de Rossignol

par
Rossignol

Ma « clientèle » de la rue Sainte-Marguerite disparaissait peu à peu. Elle s'était réfugiée cité Doré, qui donne rue Pinel et boulevard de la Gare, ou cité Jeanne-d'Arc, près de la rue Nationale, dans le treizième arrondissement.

(1894)

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Les Gobelins

Zizine

par
Alexandre Arnoux

Dans le quartier des Gobelins, un gymnase. Des athlètes donnent une représentation suivie par une foule fervente. Dans cette foule un couple a attiré l’attention du narrateur. Elle, Zizine, femme superbe ; lui, petit, contrefait, douloureux. Milarot, champion du monde, est dans la salle.

(1938)

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Saviez-vous que... ?

En 1863, le marché aux chevaux du boulebard de l'Hôpital se tenait le mercredi et le samedi de chaque semaine et le premier lundi de chaque mois.

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Le 3 janvier 1920, la cote de la Seine avait atteint 6,36 m à deux heures de l'après midi au Pont d'Austerlitz. Le quartier de la Gare était innondé.

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En 1920, on pouvait trouver un avertisseur public d''incendie à l'angle des rues Watt et du Chevaleret ainsi qu'au 31 quai de la Gare.

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En 1894, la rue des Cornes dans le quartier de la Salpêtrière, prit le nom de Jean-Baptiste Oudry (1686-1755), peintre d'animaux, notamment des chiens de chasse, et graveur, qui fut directeur de la manufacture des Gobelins en 1736.

L'image du jour

Le carrefour des Gobelins vu depuis le boulevard de Port-Royal.