Dans la presse...



La Nouvelle Cour des Miracles.

Revue municipale et gazette réunies — 10 septembre 1859

Avant de commencer cet article, qui n'a la prétention que d'être une page pour servir à l'histoire de Paris, je crois de mon devoir de dire un mot de la commission des logements insalubres.

Nommés en 1850, les membres de cette commission ont été constamment à la hauteur de la mission qui leur a été confiée. Ni le dégoût qu'auraient pu soulever des visites dans des bouges sans nom, ni les nombreux obstacles semés sous leurs pas n'ont arrêté la marche de leurs travaux. On peut le dire, l'activité de la commission a été à la hauteur de son zèle pour les intérêts généraux, et si le résultat de ses démarches n'a pas toujours été ce qu'elle en attendait, on ne doit l'attribuer qu'à des circonstances indépendantes de sa volonté et de son dévouement.

Remercions, ces messieurs pour le passé. Que nos remercîments soient un encouragement pour l'avenir. L'annexion leur promet une rude besogne. Leur courage, j'en suis sûr, ne reculera pas devant le nouveau et pénible labeur auquel le triste état de certaines parties de la banlieue les condamnera.

Je suis heureux d'apprendre que leurs honorables fonctions ne sont pas rétribuées ; ils n'en ont que plus de droits à la reconnaissance de leurs concitoyens.

Maintenant entrons en matière.

En 1853, je passais fréquemment la soirée chez un de mes amis, M. Peise, architecte-voyer de la Ville de Paris. La conversation à laquelle il savait donner un tour si animé, roulait presque toujours sur les améliorations projetées par l'Administration Municipale.

— Croiriez-vous, nous dit-il un jour, qu'il existe aujourd'hui dans Paris une nouvelle cour des Miracles; que j'ai signalé l'existence de cette truanderie à l'administration de la Voirie, et que j'ai été taxé d'exagération. Je vais vous donner quelques détails sur cet oasis de bohèmes, puis vous irez sur les lieux, et vous verrez si j'exagère le moindrement.

Dans un vaste terrain compris entre le chemin de ronde de la barrière de la Gare, se trouve un amas confus d'habitations auxquelles on ne saurait assigner une dénomination raisonnable. Ces maisons, cahutes ou masures, comme on voudra les appeler, ont été élevées en dehors de tout espèce d'alignement, sans aucun souci d'un nivellement quelconque, et suivant avec complaisance tous les accidents du terrain. La plus grande partie a été construite avec des matériaux de toute nature trouvés et ramassés à longs intervalles dans les gravois ou les tas d'ordures. Là, le grès, le morceau de brique, le plâtras réduit à sa plus minime expression, tout trouve sa place et son emploi. La vieille casserole aplatie se transforme en ardoise à côté d'un morceau de cafetière et d'une mince bande de zinc attachée sous une tuile. Le carton enduit de goudron n'est pas dédaigné, pas plus que la toile cirée ; tout sert. Le papier joue souvent le rôle de la vitre, quand toutefois un châssis en permet le luxe.

Les planches des bateaux qui nous amènent les fruits, sont venues, après un long séjour dans l'humidité, se percher à hauteur d'homme, et figurent des planchers suspendus sur des boulins comme les échafaudages d'une maison en construction.

Oh ! le feu aurait beau jeu, continua mon ami Peise, avec son accent méridional, dans ces pauvres baraques. Sans doute que l'humidité des bois défie l'incendie, autrement ils eussent été isolés des cheminées.

L'air manque presque partout dans ces masures dont la vue seule ferait dresser les cheveux d'un manœuvre. En général, les compartiments de ces demeures ne sont pas nombreux. Une de ces huttes ne se compose que de deux pièces : l'une, celle du fond, sert d'écurie. Pour y arriver, il faut passer par la pièce servant à l'habitation. C'est aussi par la première que doit se renouveler la provision d'air nécessaire aux bêtes et aux gens.

Si jamais la création d'un égout a été indispensable, c'est dans ces lieux où l'eau croupissante séjourne par force majeure et ne trouve d'autre moyen de disparaître qu'une évaporation lente et toujours fétide. Ici, mon cher ami, le water-closet serait du luxe, et peu de propriétaires s'en passent la fantaisie. En fait de lieux d'aisances, les habitants se contentent de ceux de nos premiers parents.

La population de cette villa, dont je ne saurais fixer le véritable chiffre, se compose en grande partie de chiffonniers, joueurs d'orgues, musiciens étrangers, bimbelotiers, raccommodeurs de souliers ambulants. Enfin, de tous ceux qui viennent, la nuit, chercher à Paris une existence attendue du hasard. Moyennant un loyer annuel de quelques centimes par chaque mètre, les locataires occupent une parcelle de terrain sur laquelle ils ont dû édifier à leurs frais les constructions dont j'ai fait la description non brodée, et dont ils jouiront, tant que le prix de location sera payé avec exactitude, mais qu'ils devront laisser au propriétaire du sol à leur sortie des lieux; à moins toutefois qu'ils n'aient trouvé les moyens de se rendre acquéreurs dudit terrain.

Si c'est l'instinct de la propriété qui engage ces pauvres gens à séjourner sous ces tristes abris, c'est un instinct bien fort et contre lequel beaucoup de gens ont eu le tort de médire.

J'accompagnai M. Peise dans sa visite à la cité Doré. Certes, sa description était bien au-dessous de la vérité. Il faut voir de pareilles choses pour croire. Je n'aurais pas pensé qu'il me fût donné de contempler un pareil spectacle dans Paris.

Quelque temps après, je rencontrai M. Peise.

— Eh bien ? lui dis-je.

— Eh bien, j'ai déposé mon rapport à la Préfecture.

— Après ?...

— Il a été pris en considération par la Commission des logements insalubres.

—  Et puis ?

— Et puis, et puis…

Il devint tout pâle, et me dit avec un accent indéfinissable de regret et de désappointement :

— La cité Doré restera ce qu'elle est.

— Mais la Commission des logements insalubres ?

— La Commission a donné son avis, un avis dicté par sa conscience et l'intérêt bien entendu de la sûreté et de la salubrité publique. Là se bornait sa mission.

— Dites-moi au moins le motif qui a pu porter l'Administration à se refuser aux demandes de la Commission.

— L'Administration a considéré les locataires des parcelles de terrain sur lequel ils ont élevé des constructions, comme des propriétaires, et aux termes de l'article 1er de la loi du 22 avril 1850, elle a dû leur laisser la permission d'user de leur chose comme bon leur semblerait.

— Ainsi, il n'y a plus rien à faire ? Il n'existe aucun remède à un pareil état de choses ?

— On ne peut qu'exproprier la totalité de la cité Doré.

La mort a enlevé prématurément ce pauvre Peise à sa famille, à ses travaux. Tout en pensant à lui, j'avais oublié la cité Doré, quand, il y a quelques jours, une affaire m'a appelé dans son voisinage. Je l'ai revue, cette nouvelle Pologne ; tout y est encore dans le même état qu'en 1853. L'amélioration et le progrès se sont bien gardés de franchir les portes de ce village, qui cependant, par suite de l'annexion prochaine, va se trouver en bordure sur un des boulevards de Paris.

Si l'Administration Municipale persiste dans ce laisser-faire, si la cité Doré doit rester dans son état actuel, l'existence de ce hameau ne sera pas la chose la moins curieuse de notre époque. Mais c'est bien assez d'une cité de cette espèce. Il est fort à désirer que les classes laborieuses, en présence de loyers hors de proportion avec leurs salaires, n'en viennent pas à imiter un si triste exemple. Prenons-y garde, le mal est contagieux. Visitez le terrain appartenant aux hospices, près de la barrière du Montparnasse, et dites-moi si bientôt on n'aura pas à réprimer des faits qui ne devraient se produire ni à notre époque, ni dans la capitale de la France.

PIERRE GALLIÉ.


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Le Puits artésien de la Butte-aux Cailles

L'achèvement prochain des travaux du puits artésien de la place Hébert est venu nous rappeler un autre puits du même genr dont le forage fut commencé presque à la même époque que celui du puits des hauteurs des Belleville, mais tombé complètement dans l'oubli depuis une vingtaine d'années : nous voulons parler du puits artésien de la Butte-aux-Cailles. (1889)

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L’ouverture du chemin de fer de ceinture

Le terrain s'abaisse et la vue s'élargit ; voici le chemin de fer de Sceaux, puis la Glacière, Gentilly et en face une échappée de Paris, puis un coin tranquille, tout champêtre, presque silencieux, où coule la Bièvre, cette rivière parisienne ignorée. (1867)

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Les eaux thermales de la Butte-aux-Cailles

Nous avons pu rencontrer ce matin le sympathique conseiller municipal du treizième arrondissement, M. Henri Rousselle, sur l'initiative de qui les travaux avaient été poursuivis et qui, tout heureux du résultat obtenu, nous a donné sur le puits artésien de la Butte-aux-Cailles les renseignements suivants... (1903)

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Le dispensaire Emile-Loubet

Le quartier de la Gare était en fête hier, et la population de travailleurs qui l'habite a chaleureusement manifesté au Président de la République les sentiments de gratitude qu'elle nourrit à son égard pour la nouvelle preuve de sollicitude qu'il vient de lui donner en faisant édifier l'établissement philanthropique qui portera désormais son nom. (1905)

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Trois îlots à détruire d'urgence

Avant que d'être un égout, la Bièvre, semblable en cela à tant d'autres cours d'eau avait eu ses caprices, et avait formé, entre ce qui est maintenant le boulevard Arago et l'avenue des Gobelins, un îlot coquet, au milieu duquel poussait, au hasard des apports du vent, une flore des plus variées. (1923)

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Saviez-vous que... ?

En 1897, il y avait un magasin de porcelaine au 196 de l'avenue de Choisy dans laquelle le cheval du fiacre n°7119 entra le 26 mars…

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Le 26 octobre 1923, l'automobile de M. Naudin, conseiller d'Etat, ancien préfet de police, entrait en collision avec un taxi à l'angle de l'avenue des Gobelins et du boulevard Saint-Marcel. Dégats matériels uniquement.

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Alors que la voie de 15 mètres de large qui devait remplacer la ruelle des Reculettes dont la largeur variait de 2 à 7 mètres, aurait pu recevoir un autre nom, c'est sur l'insistance de la commission du vieux Paris pour conserver ce nom pittoresque cinq fois séculaire et sur l'intervention de M. Émile Deslandes conseiller municipal du XIIIè arrondissement que le conseil municipal de Paris décida, en 1930, de substituer simplement la dénomination de rue à celle de ruelle, pour constater cet élargissement décidé en 1910.

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En juillet 1895, la petite Jeanne Monseux, âgée de 7 ans, se rendait comme chaque jour chez les époux Lorphelin demeurant boulevard Kellermann afin d’y nourrir leur chèvre qui, depuis quelques jours, affectait un comportement bizarre. Soudain, l’enfant se mit à crier. Les époux Lorphelin se précipitèrent dans la cabane et aperçurent la pauvre petite luttant désespérément contre la chèvre qui lui avait fait au visage et aux bras de profondes morsures, d'où le sang s'échappait.
Il s’avéra que la chèvre était enragée. Elle fut abattue.
Quant à la petite Jeanne, elle fut sans retard transportée à l'institut Pasteur.

L'image du jour

Rue de la Fontaine-à-Mulard