Le Métro passe la Seine
Place d’Italie - Nation
La ligne n° 6. — Le tracé et les stations. — Les quartiers desservis.
La Presse — 28 décembre 1903
La rive gauche réclamait son Métro : on va le lui accorder. Ainsi disparaîtra bientôt toute cause de jalousie entre les deux rives de la Seine. Il était grand temps qu'un peu d'équité intervint dans la répartition des lignes !
Déjà, l'on dénonçait le favoritisme qui comblait de grâces souterraines telle partie de la population parisienne au préjudice de telle autre ! Tandis que, peu à peu, tous les quartiers de la rive droite se reliaient étroitement entre eux, les quartiers de la rive gauche demeuraient abandonnés en leur splendide isolement. L'injustice est, cette fois, à la veille d'être réparée…
Avant de se séparer, le conseil municipal sera appelé, en effet, à approuver le projet relatif à l'établissement de la ligne métropolitaine n°6 du cours de Vincennes à la place d'Italie, dont la dépense est évaluée à quinze millions de francs.
Dans la conception primitive du réseau, la ligne n° 2 (circulaire sud) partait de la place de l'Etoile, traversait la Seine à droite de la passerelle de Passy, suivait les anciens boulevards extérieurs de la rive gauche en passant par la place d'Italie, franchissait la Seine en amont du pont d'Austerlitz et gagnait la place de la Nation en suivant le boulevard Diderot.
La ligne n°6
La ligné n°6, allant de la place d'Italie à la place de la Nation par le boulevard de la Gare, le pont de Bercy, les boulevards de Bercy, de Reuilly, de Picpus, les avenues de Saint-Mandé et du Bel-Air, ne semblait destinée qu'à assurer les relations avec le Métropolitain des 12e et 13e arrondissements, en raison du caractère local, son exécution avait été ajournée à une époque assez éloignée. Une circonstance heureuse pour les quartiers desservis est venue modifier cet état de choses.
La ligne n° 1, allant de la Porte-Maillot au cours de Vincennes, et la ligne n° 2 (circulaire sud), ont un tronçon commun, le boulevard Diderot ; or, la fréquence des trains de la ligne n° 1 sur ce tronçon prévu comme commun est telle qu'il est impossible de songer à y faire passer aucun, train de la ligne n°2, si bien, que cette dernière ligne aurais dû avoir nécessairement son terminus à la gare de Lyon ; l’impossibilité : d'établir une boucle à cet endroit aurait rendu l'exploitation assez défectueuse.
L'inconvénient a disparu par suite du recours à la ligne n°6 comme prolongement de la circulaire jusqu'à la place de la Nation à partir de la place d'Italie. De là, la nécessité de procéder à l'exécution de cette ligne sans attendre son rang d'inscription ; il n'y a même pas un instant à perdre.
En effet, les travaux de la ligne n° 2 (circulaire sud) touchent à leur fin; le viaduc sur lequel elle doit franchir la Seine, à Paris, sera probablement terminé à la fin de l'année 1904 et permettra de relier la section construite sur la rive gauche aux sections exploitées sur la rive droite de la Seine. L'exécution immédiate des travaux de la ligne n°6 aura pour résultat de livrer les lignes complètement a la circulation des trains vers la même époque.

Arrivé à la place d'Italie, la ligne n°2 (circulaire sud) se prolongera vers la Seine par le boulevard de la Gare, passera le pont de Bercy élargi, suivra les boulevards de Bercy, de Reuilly et de Picpus, l'avenue de Saint-Mandé jusqu'à l'avenue de Bel-Air ; là elle s'élargit en une boucle terminus dont; le circuit se fait par l'avenue du Bel-Air, la place de la Nation, la rue Dorian, et la rue de Picpus pour revenir par l'avenue de Saint-Mandé.
Au sommet de cette boucle, elle prend contact, du côté Sud, avec la station de la première ligne métropolitaine « place de la Nation », comme la ligne circulaire Nord le fait du côté Nord. La boucle terminale ainsi formée est complétée par une bride contournant l'angle aigu du Bel-Air et de Saint-Mandé et par un double raccordement de service à voie unique qui la relie à la ligne n°1 vers le cours de Vincennes.
Les deux rives
Le profil en long suit le relief du sol. La ligne sort de terre en haut du boulevard de la Gare, entre la place des Alpes et la place Pinel, s'établit en viaduc sur la contre-allée de ce boulevard, dont le profil en travers sera remanié et amélioré entre le chemin de fer d'Orléans et le quai d'Austerlitz ; puis elle franchira la Seine sur le côté amont du pont de Bercy élargi à cet effet. La ligne replonge, immédiatement après le quai de la Râpée, sur le trottoir de Bercy longeant l'entrepôt, afin de passer sous la rue de Bercy. À partir de là, la ligne se poursuit en soin terrain, passe au-dessus du chemin de fer de Vincennes au boulevard Picpus ; une station à fleur de sol sera établie en cet endroit sur la contre-allée centrale du boulevard entre la rue de Picpus et la rue du Touat.

Le pont de Bercy ayant été préalablement élargi de 5 m. 50 du côté de l'amont, la traversée de la Seine se fait sur un viaduc superposé. Ce dernier travail s'exécute sous la direction des ingénieurs du service de la navigation et aux frais de la Ville de Paris. Le viaduc sera formé d'un tablier, métallique reposant sur deux murs parallèles percés d'arcades ; chacun de ceux-ci aura 1 m. 50 d'épaisseur et les deux murs seront distants de 4 m. 50 entre les parements intérieurs. Les arcades sont en plein cintre ; elles ont 3m. 20 d'ouverture et leur hauteur sous clef est de 4 m. 04 ; elles sont séparées par des piliers de 1 m. 10 à la base. L'emploi des arcades, imité du viaduc du Point-du-Jour, permettra aux piétons de circuler librement sur le trottoir amont du pont, qui se trouve placé sous l'ouvrage du Métropolitain.
La ligne aura neuf stations, à savoir : Rue Nationale, rue du Chevaleret, quai d'Austerlitz, rue de Bercy, rue de Charenton, place Daumesnil ; Bel-Air : avenue de Saint-Mandé, place de la Nation.
La distance moyenne entre ces stations est de 521.mètres
La station terminus de la place de la Nation comporte un quai central, large de six mètres, placé dans l'entrevoie ; toutes les autres stations énumérées ci-dessus sont formées de deux quais parallèles de 4 mètres 10 de largeur utile, situés de part et d'autre des voies.

Trois stations sont en viaduc : rue Nationale, rue du Chevaleret, quai d'Austerlitz. La station « Bel-Air » est à fleur de sol. Les cinq autres : rue de Bercy, rue de Charenton, place Daumesnil, avenue de Saint-Mandé et place de la Nation sont souterraines et voûtées ; leur parement intérieur est revêtu de carreaux blancs en grès cérame émaillé, comme sur les lignes métropolitaines déjà construites.
Edouard Sattler.
L'ouverture de la ligne Place d'Italie - Nation sous la dénomination Ligne 6 eut lieu le 1er mars 1909. La ligne 6 dans son parcours actuel fut mise en œuvre en 1942. (NdE)

Aller d'Etoile à Nation par le sud se fait avec un changement à la place d'Italie.
Sur le Métropolitain dans le 13e
Les lignes réalisées :
Ligne 2 Sud (Lignes 5 et 6)
- Le Métropolitain dans les Catacombes (1902)
- La ligne Trocadéro-gare d'Orléans (1903)
- Le Métro sur la rive gauche (1903)
- La station place d'Italie (1903)
- Le Métro passe la Seine : Place d’Italie - Nation (1903)
- Le tronçon Place d'Italie-Pont d'Austerlitz (1905)
- Le Métropolitain (Place d'Italie-Place Mazas - 1906)
- Le métro sur la rive gauche : De l'Etoile à Passy et à la place d’Italie.- Ce qu'on voit sur la nouvelle ligne. — La durée du parcours.(1906)
Ligne 6 (place d'Italie- Nation)
Ligne 7
- Le Métro : où en sont les travaux (1909)
- Brève histoire de la ligne de Métro n° 7 (1926)
- Inauguration de la ligne Odéon-Place d'Italie (1930)
- La défense passive de Paris (1935)
- Les moyens dont disposent les Parisiens pour sauver leur vie (1936)
- La défense passive de Paris (1936)
Ligne 10
- Inauguration de la ligne de Métro n° 10 (1930)
- La ligne métropolitaine n° 10 doit être prolongée jusqu'à Austerlitz (1932)